« Le Dahlia noir », seconde lecture
Seconde lecture du film "Le Dahlia noir"
de Brian de Palma… (ajouté le 16/11/2006)
James Ellroy lui-même avait pourtant donné la clé en s’inspirant pour son livre culte à la fois de l’assassinat de sa propre mère quand il avait dix ans et de laffaire du Dahlia noir. Brian de Palma na pas fait autre chose Il a répondu à la création dEllroy par sa création à lui et dans le deux cas, le meurtre d’Elisabeth Short passe en fait au second plan Tant quon ne fait pas le deuil de laffaire du Dahlia noir, on ne peut pas aimer le film de De Palma
Par dessus le marché, je nai pas su apprécier à sa juste mesure, à la première vision du film, lespace pudique dobsession pour laffaire que nous a livré De Palma avec les séquences des bouts dessai d’Elisabeth Short (sublime Mia Kirschner) : instinctivement, ces séquences étaient mes préférées et je ne suis pas la seule Le réalisateur a conservé sa propre voix sur ces scènes et cest bien la voix off de Brian de Palma lui-même que lon entend harceler la starlette, subtile signature
Il faut attendre une bonne demi-heure du film avant quon montre le crime, le cadavre mutilé de Betty Short retrouvé dans lherbe dun terrain vague presque en plein Hollywood dont on ne verra rien que les têtes penchées au dessus commentant lhorreur. Vers la fin du film, quelques images du corps morcelé, une concession de De Palma à laffaire
Le film entier dénonce, au delà du crime du Dahlia noir, fut-il spectaculaire et pris ici comme symbole, la corruption du LA des années 40, sa police infiltrée par la maffia (le LAPD), ses magouilles politiciennes, sa presse possédée par les magnats au pouvoir. Mais surtout, le film démontre parfaitement le pourquoi de la surenchère de débauche : la proximité des studios de Hollywood, le miroir aux alouettes du star-system (dont fera les frais Elisabeth Short qui voulait tant être une star de cinéma comme mille autres jeunes filles de son âge) et létat de délabrement des murs qui y régnait.
Aux questions de savoir si James Ellroy était véritablement content de ladaptation de son livre, ce quil a déclaré pendant la promotion du film, même si il a plaisanté en disant que les droits de « LA Confidential » avaient payé son premier divorce et que ceux-là financeraient le second je pense quon peut répondre quil a été sincère : Ellroy et de Palma ont traité tous les deux du même sujet : le carnage de linnocence dans le LA des studios La figure du flic intègre (Bucky Bleichert/Josh Hartnett) dédouble celle du « Dahlia noir » : parachuté dans cet univers trouble et corrompu, le beau gosse pas très futé (lemploi de Josh Hartnett, acteur lisse pas intello pour deux sous, au physique avantageux de jeune premier, posé comme un bloc de certitude physique) perd son âme tout en conservant un regard pur sur les événements : la scène finale où la mère balance tout, prenant alors la figure dun monstre (le visage déformé de la mère, son jeu outré, depuis le haut de lescalier) alors que cest la seule à soudain soffusquer de la monstruosité de ce qui se passe, est éloquente. La monstruosité à Hollywood, cest de dire la vérité Je ne veux pas dévoiler la fin du film mais, comme lavait dit Sylvain Etiret dans la critique du blog datant de début septembre à Deauville, non seulement De Palma, montre avec ces dernières scènes ce quaurait pu être son film tout entier si il avait pris le parti du film dhorreur, mais encore, il y a du « Chinatown » de Polanski dans ce film, ça mavait effleurée en sortant de la première vision du film mais je ne savais pas très bien pourquoi, la fin est assez grandiose
Oui, il faut voir ce film deux fois, au moins Vivement le dvd ! ! !
Vierasouto (le 16 novembre 2006)
Scoop!!! J’ai retrouvé (sur mon téléphone mobile) une photo du splendide Aaron Eckhart venu pour la première du "Dalhia noir " en septembre à Deauville… Il joue dans le film un des deux rôles masculins : un des deux policiers chargés de l’enquête. Photo prise devant l’hôtel Royal sortie côté mer… Rêvons un peu…
Pour la sortie le mercredi 8 novembre du film de Brian de Palma «Le Dalhia noir» adapté du roman de James Ellroy, la chaîne 13ième Rue a concocté le lundi 6 novembre une soirée spéciale «Dalhia noir» avec : Un sujet sur les coulisses du film, un téléfilm tiré dun autre roman dEllroy et surtout un documentaire inédit «La Vérité sur le Dahlia noir».
Comme je lavais signalé sur le blog, jai lu il y a quelques temps un livre passionnant qui donne sa vérité sur laffaire : «Le dossier Dalhia noir» par Dan Wolfe, lauteur du livre «Marilyn Monroe, enquête sur un assassinat». Il raconte dailleurs que cest en faisant son enquête sur la mort de Marilyn quil a eu par hasard les premiers éléments de celle du Dalhia noir. A noter que les deux mythes (le Dahlia noir étant une sorte de Marilyn brune qui naurait pas eu le temps de le devenir) se connaissaient un peu Elisabeth Short avait croisé Norma Jean Dougherty à ses débuts quand les deux trop jolies femmes se montraient et se vendaient dans les bars pour starlettes du LA. A cette époque des années 40/50, LA était une terre de corruption avec sa police infiltrée par la mafia (dont le fameux Bugsy Siegel, brute sanguinaire jouant les latin lovers à Hollywood) qui fournissait des jolies filles aux magnats des studios. Tout ça est admirablement raconté par Dan Wolfe qui, enfant, vivait à Beverly Hills du mauvais côté de la rue
Cependant, les pistes sont nombreuses : le précédent ouvrage sur le Dalhia noir, écrit par Steve Hodel, accusait son père dêtre lassassin La version de Dan Wolfe est plus cynique Pourquoi a-t-on trouvé le corps de Betty Short coupé en deux et éviscéré, avec une blessure taillée au couteau dune oreille à lautre, signe de trahison dans la mafia sicilienne A vrai dire, ce livre est nettement plus captivant que le film de Brian de Palma (bien entendu, le livre dont il est adapté nest pas le même non plus, James Ellroy ayant dit clairement quil avait mêlé laffaire du Dalhia noir et lassassinat de sa mère). Le film pêche par son surcroît narratif et poétique, qui plus est avec les visages de trois femmes différentes, omettant la dimension essentielle de lobsession de lenquêteur qui passera sa vie à chercher la solution et de lAmérique qui sy intéresse encore 50 ans après le crime, ce qui est un comble pour le réalisateur d«Obsession» Mais ça nest nullement un mauvais film raté comme se sont plu à laffirmer sans beaucoup darguments que le fait quils sétaient ennuyés les critiques de la presse écrite. On est un peu déçu mais on attendait sans doute trop de la rencontre explosive De Palma-Ellroy.
Voir aussi mon article sur l’affaire du Dalhia noir sur Agoravox…
«Le Dalhia noir» de Brian de Palma avec Aaron Eckhart, Josh Hartnett, Scarlett Johansson, Hilary Swank et Mia Kirschner. Film en compétition à la Mostra de Venise et présenté à Deauville. Lire la critique du blog sur le film
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