« La Mort en ce jardin » : US Bunuel

Luis Bunuel, 1956, sortie DVD 8 juin 2010

Pitch

sur les rives de l'Amazonie, des prospecteurs de diamants se révoltent face à l'annonce de la nationalisation des mines. Un étranger, un tenancier d'auberge et sa fille sourd-muette, un prêtre missionnaire et une prostituée vénale vont essayer de s'enfuir dans la jungle.

Ce film de la période mexicaine de Bunuel, pays où il résida de 1949 à 1965 en tant que citoyen mexicain, est aussi une coproduction française, Bunuel ayant débuté en France avec les surréalistes. Ce qui explique le casting français assez somptueux : Simone Signoret, Charles Vanel, Georges Marchal et Michel Piccoli qui allait démarrer une longue collaboration et amitié avec Bunuel et pour lequel le réalisateur réécrira la rôle du prêtre. Car « La Mort en ce jardin » est un film adapté d’un livre éponyme de José-André Lacour où le personnage du missionnaire était plus âgé et rondouillard, Piccoli, à cette époque, étant un trentenaire élancé.
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photo Montparnasse éditions

Ce film comporte deux parties distinctes et c’est dans la seconde partie qu’on retrouve plus facilement la symbolique Bunuelienne. Vu de loin, ce film est assez banal, d’abord, une révolte des mineurs dans un bourg pauvre proche la frontière brésilienne, ensuite, une équipée dans la jungle Amazonienne de 5 personnages essayant de survivre, genre film d’aventure américain.
Devant l’annonce de la nationalisation des mines de diamants, c’est l’émeute, l’armée réprime brutalement les manifestations. Le père Lizardi, missionnaire colonnialiste, tente d’apaiser les consciences avec un discours tout fait, cherchant à rejoindre à tout prix un village du bout du monde à évangéliser. Le tenancier de l’auberge, Castin, prospecteur bigot, et sa fille Maria sourd-muette, pensent à plier bagages et ouvrir un restaurant à Marseille. Dans l’intervalle, Shark, un bel étranger, est venu chahuter à l’auberge avec Maria, puis, va s’offrir une nuit chez Djin, une prostituée vénale sans peur (Simone Signoret) qui le dénonce ensuite contre une prime. Finalement, Castin, sa fille Maria, Shark, Djin et le père Lizardi prennent un bateau pour descendre le fleuve jusqu’à la frontière brésilienne.


photo Montparnasse éditions

C’est le début de la seconde partie, qui évolue vers l’exode de 5 personnages dans la jungle n’ayant plus rien pour se nourrir… Un film d’aventure impitoyable dans la veine de John Huston perverti par les fantasmes et obsessions de Bunuel (comme les lacets de bottes de Maria…) mais obéissant également à une symbolique biblique… Le jardin d’Eden va s’avérer un enfer selon ce que vont en faire les humains en place… La scène clé du serpent trouvé par Shark qu’on comptait partager et manger est éloquente : pendant que les 5 cherchent à allumer du feu, le serpent est dévoré par les fourmis… Plus tard, la découverte d’un avion providence, objet de cupidité, où il y a des vivres, des vêtements et des bijoux dans des mallettes en croco, va paradoxalement provoquer la colère « divine » de Castin qui a perdu la tête (il enlève son bandeau, il jette ses diamants dans le fleuve) et la chute du groupe dont deux personnages vont finalement s’en sortir : la plus pure et le plus corrompu…
Simone Signoret est assez sublime en robe du soir en lamé et collier, bracelet en brillants dans la jungle, cette scène complètement insensée dans un film d’aventure passe assez bien grâce à l’assurance de Bunuel à incruster le film de ce genre de bijoux ;  surréaliste également la scène où le père regardant depuis la jungle une carte postale de l’Arc de triomphe à Paris … s’y transporte… alors qu’il veut aller à Marseille… Pas un grand film mais un hybride, une curiosité…

DVD « La Mort en ce jardin » Editions Montparnasse. Sortie 8 juin 2010.

2 Bonus : « Un film américain de Luis Bunuel » par Charles Tesson ; « A sa main », analyses de séquences par Philippe Rouyer.

 

Notre note

3 out of 5 stars (3 / 5)

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Posted by:

Camille Marty-Musso
Créateur et responsable éditorial du site www.cinemaniac.fr, en ligne depuis janvier 2006.

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