
« The Lookout » : une amnésie à oublier…/Avant-première
Une projection à laquelle je ne devais pas me rendre… et que le hasard (et la gentillesse de l’attaché de presse) a mis sur mon chemin Malheureusement, je ne sais quelle qualité je vais trouver à extraire de ce film à gros budget et petit talent à tous points de vue : le film démarre en fanfare avec un accident de voiture, musique à fond la caisse, objectif grand public à qui on serait censé arracher les tympans pour quil écoute quelque chose et puis stop, tout un film en demi-teinte et encore vers la fin, on reprend du service pour une séquence action tintamarre et coups de feu, puis basta
Chris Pratt, play-boy champion dans son collège, est devenu une épave après laccident de voiture qui a coûté la vie aux trois autres passagers quil transportait bien quon ne soit pas certain que sa petite amie, une blonde Barbie, soit vraiment morte ou handicapée à vie dans ses fantasmes. Quatre ans après laccident, Chris Pratt occupe une bonne partie de son temps à faire de la rééducation de la mémoire, il note tout sur un carnet, il oublie tout, il relit son carnet, ne se souvenant que de lavant laccident et partiellement de laprès. Autre symptôme de son handicap, Chris ne censure plus ses propos et dit ce quil lui passe par la tête comme «je veux te voir nue» à une femme quil vient de rencontrer. De même, il ne contrôle pas ses colères, étant en quelque sorte décivilisé. De très très très loin, on, peut penser au génial "Memento" avec les souvenirs à rebours et les tatouages, une comparaison inverse où ici tout serait laborieux, ressassé et redondant Les images surlignées, bissées, supposent que le spectateur serait lui aussi frappé damnésie, occupé à autre chose que de regarder le film (à envoyer des textos, peut-être…).
Rencontrant par un hasard, qui nen pas un, un ex boy-friend de sa sur Alisson dont il ne se souvient plus, lancienne star du collège, admiré et envié autrefois, devenu veilleur de nuit (à vérifier sur une liste qu’il a passé le balai et changé une ampoule) dans une modeste agence bancaire, va se retrouver la proie du dévoyé Gary. La jeune ex strip-teaseuse, envoyée par Gary pour mettre du liant dans leur association, voit toujours Chris avec les yeux dautrefois, et résume la situation en sesclaffant «dire que j’ai couché avec Chris Pratt!» De fil en aiguille, Chris devient le complice amnésique mais actif dune bande de voyous projetant un casse.
Daprès le dossier de presse, lacteur principal, Joseph Gordon-Levitt, est le transfuge du bouleversant "Mysterious skin" de Greg Araki, il faut le savoir car je ne lai pas reconnu (amnésie encore ?) Encore dans le dossier de presse (quil ne faut pas lire, je sais ), le projet du réalisateur aurait été un croisement entre drame intimiste et polar, une hybridation délicate qui ne prend pas. On peut chercher quelques notes positives dans les relations entre Chris et son colocataire Lewis (Jeff Daniels), gros nounours mal voyant, seul vrai ami, soutien et confident à ne pas lavoir connu du temps de sa gloire. Mais, là aussi, les relations entre les deux hommes ne sont pas fines, on use chaque idée jusquà la corde, on insiste, on veut émouvoir à tout prix. Pendant tout le film, on sent une volonté de fabrication des sentiments ou sensations que devrait ressentir le spectateur : fabriquer du suspense, fabriquer de lémotion, mais, très franchement, rien dans ce récit néveille la curiosité et la dimension thriller est théorique : cest dommage car les éléments du scénario permettaient de titiller le spectateur avec les causes de cet accident initial (bâclées), ce changement de personnalité du héros (hors problèmes de mémoire), le portrait de la fiancée Barbie de l’accident (zappé), etc Du côté de l’émotion, cest mieux par comparaison au naufrage du polar mais ça ne va pas fort loin non plus, on est vite lassé par les lourdeurs, Larry aurait perdu la vue en prenant de lacide dont les vapeurs etc alors que la fenêtre était fermée… Cest un peu lhistoire du type qui meurt en sétranglant avec une tranche de jambon, ça ne fait aucun effet dramatique !
Pendant que les personnages ressassent sur lécran, on en vient à cogiter sur son siège entre sa liste de courses et le coca (light ) frais quon boirait volontiers à la sortie : quel intérêt de financer ce genre de films qui ne sadressent à personne, pas assez daction pour les uns, trop de bruit pour les autres, une émotion en kit, la thématique de la mémoire mille fois et mieux traitée ailleurs, des acteurs peu convaincants, une intrigue plate. Quant aux supposées souffrances du personnage après son accident, quand on vient de voir "Le Scaphandre et le papillon", par ailleurs magiquement filmé, crée par un artiste du point de vue de la mise en scène, la finesse des sentiments ici, cest exactement le contraire, une sorte de contre-leçon de film.
Ce film sortant la semaine prochaine en salles, comme sur le papier, le pitch est alléchant, prudence, une sensation de découragement peut vous faire quitter la salle prématurément
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