« LA DOUBLURE » : Pignon avec son double pour moitié/sortie DVD

« LA DOUBLURE » : Pignon avec son double pour moitié/sortie DVD

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Il faudra s’y faire, jamais Francis Veber ne pourra reconstituer le duo Pierre Richard et Gérard Depardieu de la trilogie «La Chèvre», «Les Compères», et «Les Fugitifs», jamais plus nous ne suivrons Perrin (Pignon) et Campana au Mexique ou à Nice, souvenirs… «tout petit déjà, j’ai avalé une aiguille… comme le jour où je me suis électrocuté avec la machine à café, je voulais avoir du jus, j’en ai eu!», «allez vous reposer, moi, je reste sur le pont…» (dans le bar louche où Perrin «interroge» une prostituée), «ça me rappelle le pavillon de mes parents à Pantin…» (la mission incendiée au cœur de la jungle), on peut toujours ressasser, il faudra bien se résoudre à en faire son deuil, Capri, c’est fini…

Remettons le pied sur terre : faute d’avoir trouvé des duettistes de remplacement, du trop pathétique Villeret dans «Le Dîner de cons» à Auteuil en ménage avec un Depardieu pitoyable en faux macho à pull rose dans «Le Placard», Veber a renoncé à son schéma comique préféré, du moins en partie : au lieu d’un comique de juxtaposition né de l’intimité forcée de deux personnages que tout oppose, le looser naïf et la brute sans vergogne, dans «La Doublure», les mêmes types de personnages antagonistes sont en place à la différence qu’ils ne se rencontreront jamais ou quasiment pas.

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Soit un odieux et puissant PDG, Pierre Levasseur (Daniel Auteuil), surtout riche de la fortune de sa femme, pris en flagrant délit de dispute dans la rue avec sa maîtresse Elena (Alice Taglioni), sorte de Gisèle Bündchen posant pour la campagne Chanel. La photo de l’adultère ayant paru dans la presse people, Madame Levasseur (Kristin Scott-Thomas) s’en émeut : c’est alors que l’avocat d’affaires (Richard Berry) du PDG a une idée de génie : un benêt qui figure par hasard en arrière-plan sur la photo va servir d’alibi : il s’agit d’un modeste voiturier, François Pignon (Gad Elmaleh) officiant dans le très chic restaurant «Les Jardins d’Auteuil» au Trocadéro qui vit dans logement exigu, flanqué d’un collègue parasite (Danny Boon) qu’il héberge. Au voiturier et à la maîtresse fâchée, l’avocat propose un marché pour habiter ensemble et jouer au couple amoureux le temps de calmer l’incrédulité de Madame Levasseur qui a engagé un détective.

Pendant que Levasseur se ronge de jalousie avec son chauffeur et son garde du corps en soupçonnant Elena de partager le même lit que sa doublure avec trop de zèle, Emilie, le grand amour de Pignon, jeune libraire et fille du médecin de famille, qui l’ignorait jusqu’alors, lui tomberait bien dans les bras qu’elle croit occupés par le top model. On rit souvent et franchement dans ce vaudeville classique et efficace à la Feydeau où les malentendus et les comiques de situation s’enchaînent avec humour et élégance, ce dont on a perdu l’habitude… (Dujardin et Dupontel reviennent la semaine prochaine…). Les gags n’ont rien de très inventif comme la musique de Pretty Woman quand les top models débarquent, une histoire de rideaux un peu longuette ou des répliques comme «pour un voiturier, il s’est trouvé une belle carrosserie !» mais Veber a le bon tempo sur un vrai scénario !

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Ce qui est particulièrement réussi dans ce film, ce sont les seconds rôles, en particulier, le couple formé par le père de Pignon (Michel Jonaz) et le médecin de famille (Michel Aumont) allergique aux malades qu’il faut réanimer à chacune de ses visites. Richard Berry est particulièrement savoureux en avocat faux-cul et la sublime Kristin Scott-Thomas a une classe folle dans le rôle de Madame Levasseur, il faut la voir sortir de sa voiture en talon de daim rouge cerise avec veste assortie… Je n’en dirai pas autant de Daniel Auteuil, le visage grimaçant et déformé de rictus, jouant aussi finement qu’à ses débuts dans «Les Sous-Doués» ou « Les Hommes préfèrent les grosses », à présent qu’il ne compose plus que les introvertis, il a dû oublier les ressorts de la comédie… Mieux inspiré ici que récemment dans «Olé», une pâle copie des comédies de Veber, le beau Gad Elmaleh n’a qu’un défaut : celui d’être un peu trop séduisant pour jouer les Pignon mais on aime bien quand même son œil rond, sa chemise boutonnée sous le menton, sa raie de côté sur ses cheveux plaqués années 20 et ses épaules rentrées en marchant, c’est sûrement le meilleur depuis Pierre Richard. Quant au top model Helena/Alice Taglioni, c’est une super-bombe platine en total look Chanel Lagerfeld ou micro jupe en jean et extensions de cheveux longs blonds bouclés. Pas grand-chose à dire pour Virginie Ledoyen avec un rôle de jeune fille énergique et froide qu’elle assure souvent comme dans «Bon Voyage».

Bien entendu, Francis Veber refait toujours un peu le même film, obsédé par les rapports de force et la sempiternelle opposition d’un crétin pauvre et crédule qui s’avèrera moins con qu’un puissant riche et brutal. Cependant, c’est un film sympa, rafraîchissant et euphorisant d’où on sort d’humeur légère. Je suis allée voir cette «Doublure» avec 33 cl de Coca (Light, of course…) sans en attendre beaucoup après avoir entendu et lu tout le WE «ce Pignon est rat黅 et je suis sortie du cinéma agréablement surprise…

Je n’oublie pas pour autant « mon » Pignon fétiche, Pierre Richard, encore bien supérieur à son ancêtre Jacques Brel , premier du rôle dans «L’Emmerdeur. Bien que j’ai vu «La Chèvre» une bonne quinzaine de fois, je ne me lasse pas de l’exaltation dès le générique avec cette musique allègre de flûte de paon… Tiens, si au lieu d’écrire cette critique, j’allais m’en repasser une petite version… En attendant l’emplette en DVD du «Grand Blond avec une chaussure noire» et du «Retour du grand blond»…

 

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zoliobi

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