« Lucy » in the sky with diamonds…

Notre note

lucy

Portrait d’une jeune mère célibataire de 18 ans, Maggy, qui voudrait vivre comme toutes les ados de son âge tout en s’occupant de son bébé mais pas trop…

Lucy a quelques mois, son père, un ado de l’âge de Maggy, s’est défilé, on le comprend par quelques mots échangés (lors des premières images du film) dans un parc entre deux jeunes gens, Maggy dit à un blondinet "pour un chien, tu as les moyens" et il répond que c’est un cadeau, ce chien, elle objecte qu’il faut le nourrir, que le chien mangera beaucoup en grandissant… Elle rappelle néanmoins Daniel pour garder leur enfant quand l’envie de sortir prend le dessus. Dans une boite de nuit, elle rencontre Gordon et emménage avec lui et Lucy. Mais la vie de famille a rapidement raison de la bonne volonté du nouveau copain.

Dans ce film pur et tranchant comme une lame, le réalisateur esquisse plus qu’il ne dessine le parcours d’une enfant qui a un enfant et ne sait pas très bien quoi en faire pour continuer à vivre sa vie sans entraves tout en assumant ses nouvelles responsabilités… Les épreuves et les difficultés de Maggy sont traitées par une chronique du quotidien observé à la loupe que le spectateur jugera sur pièces. Le bouleversement que constitue l’achat d’un lave-linge dans la vie de célibataire de Gordon, un appareil flambant neuf qu’on oubliera de brancher, les tâches domestiques répétitives, la surveillance de l’enfant qui prend toute la place, l’absence d’intimité dans l’unique pièce du studio de Gordon, l’omniprésence de la télévision qui réunit le couple sur le canapé, l’écran de l’ordinateur de Gordon demeurant sa seule évasion perso.

Les relations tendues avec la mère de Maguy sont traitées de la même façon par la mise en scène des micro-évènements de la vie : les petits déjeuners de Maggy avec Gordon sous le toit de la mère qui fait la gueule, le non dit entre la mère et la fille qui explose "je t’ai déjà entendu baiser, c’est toi qui a commencé", la dureté de la mère qui voudrait refaire sa vie aussi, l’indifférence aimable du personnel de la crèche, les copines qu’on perd de vue, les copains de bringue qui raillent Gordon.

Ni émotion ni pathos mais un constat clinique de la situation ni réjouissante ni dramatique, soumise au rouleau compresseur de l’usure quotidienne. Articulé autour de Lucy, l’enfant, le film se focalise sur Maggy dont on citera à peine le prénom, son statut de mère-enfant ayant pris le dessus.

De la vie de Maggy avant la naissance, on ne dira pas grand chose explicitement mais une foule de petites phrases et de mises en situation y font référence : l’absence de père en héritage… pas d’homme dans l’ombre de la solitude de la mère de Maggy, un Daniel ex-copain, père putatif de Lucy, démissionnaire au premier plan du film… Maggy est bien partie pour reproduire le schéma maternel… L’impossibilité pour Maggy d’apprendre un métier avec un enfant à charge, illustrée par les rendez-vous de Maggie avec sa copine en apprentissage de la coiffure…

Des sentiments de Maggy envers les hommes de sa vie, on n’en saura encore moins sauf sa déception presque muette : Gordon chassera Daniel, lui-même remplacé par un autre, des hommes qui semblent interchangeables… La seule constante sera Lucy, la petite fille surnuméraire qui demeure le seul point d’ancrage de Maggy.

Second film du réalisateur Henner Winckler après "Voyage scolaire", ce film a été présenté au festival de Berlin 2006 dans la section "forum des Berlinales". Présenté également au festival Paris-Cinéma dans le cadre du renouveau du cinéma allemand, "Lucy" a les couleurs de cette nouvelle vague de cinéastes introvertis et lucides, comme Christoph Hochhäusler ("Le Bois lacté" et "L’Imposteur") et Valeska Grisebach ("Sehnsucht" en compétition à Paris-Cinéma), qui font un cinéma factuel sans artifice ni démontration, tout en retenue, utilisant les sons réels et les images d’un quotidien ancré dans une réalité ni embellie ni enlaidie, pariant que cette réalité est souvent plus parlante que la fiction…

Mini-Pitch : portrait d’une jeune mère célibataire de 18 ans tiraillée entre ses responsabilités nouvelles et l’envie de sortir avec des gens de son âge, un cinéma au plus près du réel de l’excellente nouvelle vague allemande.

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zoliobi

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