« Mr Nobody » : pourquoi faire simple quand on sait faire compliqué?

Jaco Van Dormael, sortie 13 janvier 2009

Pitch

Un gamin ne peut pas choisir entre son père et sa mère qui se séparent. Devenu un vieillard en fin de vie, dernier mortel dans un monde d'immortels, Nemo Nobody imagine quels auraient pu être tous ses destins possibles en fonction d'une arborescence de choix potentiels.

Une histoire simple racontée de manière extrêmement compliquée et ambitieuse, pour ne pas dire prétentieuse, avec un sentiment qui prédomine en regardant cet interminable film, « pénible », ce film aux qualités techniques indéniables est pénible à regarder. Depuis quelques temps, chacun y va de son conte philosophique, la faute peut-être à l’absence de philosophie et de philosophes, à d’autres valeurs spirituelles que le confort amoureux, la séduction et la consommation. La faute à la tentative de déni de notre condition de mortel en augmentant la longévité afin de jouer les prolongations d’une vie, fut-elle de plus en plus pénible pour la majorité, et qu’importe si les personnes âgées approchant les 100 ans n’ont plus dans nos sociétés jeunistes anti-âge de quoi vivre décemment avec de maigres retraites en dévaluation…
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photo Wild Bunch

L’immortalité est au centre du film par défaut : un vieil homme sur la planète Mars est le dernier des mortels, tous les autres étant bricolés pour vivre éternellement avec le renouvellement perpétuel artificiel de leurs cellules… Cet homme, qui représente l’homme et le catalogue de ses destinées potentielles (rien que ça…) s’appelle Nemo Nobody et se souvient de son passé avec tous les possibles qu’il n’a pas vécu mais qu’il aurait pu vivre. Ainsi, enfant, Nemo a connu trois petites filles, Anna, la brune à la robe rouge, Elise, la blonde à la robe bleue et Jeanne, l’asiatique à la robe jaune. Ainsi, Nemo aurait pu vivre trois histoires d’amour, trois mariages, trois vies de couple avec les 3 fillettes devenues adultes interprétées par Diane Krüger, Sarah Polley et Linh-Dan Pham.
 


photo Wild Bunch

Cette imposture du choix permanent, cette quête de tous les possibles rend fou et le film est une folie maîtrisée à recommencer sans cesse, à revivre toutes les possibilités de vie, pour en revenir à la scène initiale très démago : un enfant doit choisir entre son père et sa mère quand ceux-ci décident de se séparer, sur le quai de la gare, l’enfant, prostré, ne peut pas choisir ou veut choisir les deux solutions à la fois, ce qui revient au même, tout ça pour ça…
Nemo vieillard face à son médecin le visage tatoué, Nemo mari trois fois dans trois cas, amour partagé avec Anna, amant à sens unique avec Elise, étant aimé sans réciproque avec Jeanne, Nemo abattu par méprise par un tueur à gages, Nemo noyé, etc… Le film tourne en boucle avec 36 effets spéciaux, des couleurs, des musiques, des complications de tout, un vrai passeport pour la migraine. Pourtant, le réalisateur est doué, trop doué sans doute, incapable de fixer une limite à son imagination et à son budget aussi sans doute, c’est aussi ce qui vient à l’esprit en regardant ce film : quel luxe, quelle débauche d’effets spéciaux ou pas, quelle absence de simplicité… Le réalisateur le dit lui-même « un projet maximaliste avec une approche minimaliste », qu’on pourrait traduire en voyant le film par un projet mégalo reposant sur pas grand chose et se la jouant philosophie de la destinée (surtout amoureuse, c’est fédérateur). L’humilité et la simplicité ne sont plus tendance, on en prend toute la mesure ici… Le réalisateur en parlant de Nemo Nobody le définit comme « tout le monde et personne à la fois. Une illusion, le fruit du rêve, l’amour, l’espoir, la vie, la mort », etc… un conte philosophique avec une particularité collant bien à notre civilisation consumériste, hédoniste : l’absence de morale revendiquée…


photo Wild Bunch 

 

Notre note

2 out of 5 stars (2 / 5)

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Posted by:

Camille Marty-Musso
Créateur et responsable éditorial du site www.cinemaniac.fr, en ligne depuis janvier 2006.

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