« Parlez-moi de vous » : ce qu’on n’est/naît et ce qu’on devient

Pierre Pinaud, sortie 11 janvier 2012

Pitch

Star la nuit sur les ondes, anonyme le jour, terrée chez elle, interdisant les photos, une animatrice radio part à la recherche de sa mère biologique dont elle a retrouvé l'adresse grâce à une agence de détectives.

Mélina, quadragénaire chic et mystérieuse, est une des animatrices radio les plus célèbres de l’Hexagone. Son émission « Parlez-moi de vous », où elle démêle les problèmes affectifs et sexuels des auditeurs, cartonne toutes les nuits. Mais personne ou presque ne connaît son visage, ses collaborateurs proches ignorent même son adresse et elle tient à emporter le courrier des lecteurs elle-même, soit une énorme sacoche tous les soirs, pour qu’on ne sonne pas chez elle. Réfugiée dans un bel appartement du 16° arrondissement, qu’on présente meublé sommairement dans le genre décorateur, impersonnel, Mélina n’a qu’un seul vrai interlocuteur : son chien.
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photo Diaphana

Le secret de Mélina, alias Claire Martin, ce sont les mystères de ses origines, recevant un courrier d’une agence de détective privée, elle se rend dans une banlieue du Val de marne à une adresse où se trouverait habiter Joëlle Goulain, la mère qui l’a abandonnée enfant à l’orphelinat. Après plusieurs tentatives infructueuses de sortir de sa voiture, Mélina est happée par une dame du Secours catholique de cette banlieue modeste, une collègue de sa mère, qui croit qu’elle vient postuler comme bénévole. Désormais intégrée comme bénévole plusieurs fois par semaine, Mélina fait la connaissance par hasard de Lucas, le séduisant fils d’un premier mariage de l’épouse, Ingrid, de son demi-frère, Bernard. Ingrid, auditrice inconditionnelle de l »émission radio de Mélina, ne fait pas le rapprochement, Joëlle, la mère putative, débordée par une vie à trimer et à ronchonner, ne s’intéresse pas à elle, seul Lucas a remarqué combien elle dénote dans leur banlieue dans son manteau Burberry’s sanglé, avec son sac à main de marque, ses gants en cuir qu’elle ne quitte jamais.


photo Diaphana

Cette comédie dramatique tendance sentimentale offre à Karin Viard un rôle sur mesure où elle est de tous les plans. Pour qui aime Karin Viard (ici au mieux de sa forme), ce qui est mon cas, c’est un vrai bonheur, d’autant que la réplique donnée par Nicolas Duvauchelle, un des meilleurs acteurs de sa génération, donne du sel au film. Bien entendu, tout est stylisé, on surligne à gros traits la différence entre le pavillon de banlieue de Joëlle Goulain et le somptueux hall en marbre blond de l’immeuble de Mélina à Paris. Mais, sous des allures légères, le sujet est grave, ce placard où s’enferme Mélina dans son appartement, redevenue Claire Martin avec un petit poste radio et une carte postale usée, même présenté de manière humoristique, est triste et étroit comme l’existence de Mélina qui n’en en aucune en dehors de son personnage sympa et souriant de la radio.

La fin du film pêche un peu par où et comment il veut conclure, hésitant entre un certain réalisme de l’impossible annulation rétro-active du passé et une fin néanmoins à la hauteur du genre comédie choisi. Tentant une histoire d’amour entre Mélina et Lucas, on y renonce. Car le film, sous des dehors superficiels, est plutôt une leçon de renoncement, de travail de deuil, d’acceptation qu’on est (on devrait être) ce qu’on devient et construit de sa vie davantage que ce qu’on trimballe du passé. Légère en surface et grave en sous-sol, cette comédie de la comédie de la vie vaut le détour, on rit plus qu’on ne pleure mais on y réfléchit (un peu) ensuite…


photo Diaphana

Notre note

4 out of 5 stars (4 / 5)

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Posted by:

Camille Marty-Musso
Créateur et responsable éditorial du site www.cinemaniac.fr, en ligne depuis janvier 2006.

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