Rocky Balboa : le retour de Rocky 1
Cest la bonne surprise de la semaine : Rocky 1 est de retour après la pénible période action man des années 80 Quand le jeune champion du monde lui demande «cest pas un truc des années 80?» Il répond «des années 70..», tout est dit
Stallone aurait-il fait de la sincérité son fonds de commerce quil nen demeurerait pas moins sincère et émouvant Quand le sexagénaire Rocky/Stallone apparaît à lécran, son visage ravagé et mélancolique en dit plus long que les grands discours quaffectionne le scénariste Stallone qui surligne, ayant toujours frais à lesprit quil sadresse à un grand public comme lui : un gamin Philadelphie, né dun accouchement au forceps avec une semi-paralysie faciale, malingre et pauvre, qui nest devenu une superstar bodybuildée engrangeant les dollars quà force de volonté, dintelligence et de foi en lui-même.
Cela eût été un peu gros de débarquer à soixante ans rempiler sur le ring, Stallone anticipe les critiques qui nauraient pas manqué de pleuvoir pour le ridiculiser : la belle première partie de son film est un pèlerinage Rocky, une ballade nostalgique sur le temps qui passe au moins autant que la revue des souvenirs de la carrière de Rocky Un ancien champion de boxe, vieilli et usé par les deuils, trop bodybuildé, botoxé, bronzé aux UV, se souvient De sa femme Adrian à qui il va parler au cimetière, de la patinoire où il la rencontrée, flanqué de son beau-frère Paulie devenu alcoolique et acariâtre Le rôle de Paulie (ses dialogues), le beau-frère, est essentiel, car cest la voix de Stallone le lucide qui rappelle que tout ça ne veut plus rien dire
Se souvenir est devenu une activité à plein temps pour Rocky : son restaurant de Philadelphie, temple de la nostalgie, est un prétexte à raconter inlassablement aux clients ses exploits passés sur le ring, outre les visites à lentraîneur, ou dans les bars dautrefois aujourdhui désertés : cest pourtant là quil rencontre son futur amour : Mary et son fils quil veut aider Malin aussi de la part de Stallone davoir rajeuni la fiancée de Rocky mine de rien en restant crédible : la grande force de Rocky/Stallone, cest quil nessaye pas de faire plus jeune que son âge, se montrant tel quil est devenu avec les stigmates de sa vie sur son visage destroy
Stallone a toujours écrit les scénarios de ses films qui correspondent aux périodes de sa vie : Rocky1 (1976) est un tour de force en ayant pigé le rêve américain à la fois pour y accéder et le raconter, le vendre, transposé dans lunivers de la boxe Pour lanecdote, à lépoque, les studios trouvent Stallone si mauvais comme acteur quils lui offrent $150 000 pour renoncer à interpréter lui-même le rôle mais il refuse La supposée bêtise de Stallone est une légende, lhomme est particulièrement intelligent et lucide, anticipant les réactions du public quant à sa crédibilité du moment, on ne peut plus en douter avec ce Rocky 6 ayant récupéré son patronyme Balboa pour un retour le profil bas Tout comme Rocky, aujourdhui, lacteur est depuis une bonne décennie un has been ayant accumulé les bides et se perdant dans des émission télé genre télé-réalité. Bien quil ait dit dans une interview avoir regretté ce film, sa prestation dans « Copland », film ciné indépendant américain qui ne pouvait rivaliser avec laudience des grosses machines Rocky et Rambo, était brillante mais pas rémunérative cest là où on doute quand même un peu de son amour du métier de comédien, Stallone, son métier, cest star Cest le sujet du film : comment revenir en beauté en négociant avec lindéniable vieillissement de lacteur et sa projection Rocky : à la fois en ne trichant pas et en roulant tout le monde.
Bonne idée de scénario que ce combat sur ordinateur que Rocky voit à la télé opposant les gagnants de différentes époques, qui donnera lidée au restaurateur Rocky de se réinscrire au championnat pour combattre une dernière fois Ce combat avec Mason Dixon, le nouveau champion du monde (invaincu mais impopulaire, une trouvaille), cest un dernier combat pour Rocky 6 comme un cétait le premier combat pour Rocky 1 qui nen briguait quun seul La lucidité et la modestie et les vieilles et vraies valeurs, les scènes avec son fils à qui il explique que le courage ce nest pas dêtre « cogneur mais cogné et davancer quand même », de ne pas chercher le pourquoi du comment on va mal dans son enfance pour sempêcher de se battre Pendant le dernier combat, il dira au jeune champion qui lenjoint darrêter quil ira jusquoù il doit aller Cest un peu gros mais ça fonctionne, lhomme est émouvant, sa volonté et sa détermination à mourir sur le ring plutôt que de renoncer, faisant écho à celle de lacteur de revenir sur le devant de la scène, même vieux, même rétrogradé, même raillé, est touchante, on craque pour ce Rocky Balboa
Sagissant du film en soi, rien de révolutionnaire avec lutilisation du numérique pour la scène de lultime combat dont la rediffusion à la télé expliquerait le choix de la filmer comme la voient les téléspectateurs. Bien que la première partie, filmée de façon très classique sans chichis, soit le vrai film sur la fin de la jeunesse et le deuil de la gloire, la seconde partie est très ludique malgré une période dentraînement expédiée trop rapidement et des images du combat un peu compliquées ne sintégrant pas très bien au reste.
Dans la salle de cinéma où jai vu le film, on encourageait, on tapait dans ses mains, on applaudissait, on sifflait, et quand la musique de Rocky1 survient, lémotion est à son comble, il faudrait être une pierre pour résister à se laisser entraîner et ne pas souhaiter quil gagne, ce Rocky Balboa, qui a de toute façon réussi son pari ! ! !
Laisser un commentaire