Cannes 2007/UN CERTAIN REGARD/ « El Bano del papa » + « Pleasure factory » + « Et puis les touristes » + « L’Avocat de la terreur »
Notre note
"El Bano del papa"****de Enrique Fernandez et César Charlone (Uruguay)
C’est de loin le film que jai préféré de la journée : à loccasion de la visite du pape dans une petite ville Urugayenne, la population espère tirer parti de la foule de touristes qui ne manquera pas denvahir les lieux en préparant quantité de stands de nourriture et dobjets à vendre. Ainsi, Beto, modeste contrebandier qui sépuise à traverser plusieurs fois par semaine la frontière entre lUruguay et le Brésil à vélo, chargé comme une mule, a une idée de génie : installer des toilettes payantes pour les visiteurs du pape. Ce film dont un des deux réalisateurs est le chef opérateur de Fernando Mereilles ("La Cité de dieu", "The Constant gardener") ressemble pas mal aux films brésiliens à quelques nuances de près (le caractère des personnages moins joyeux). Bien quil y ait beaucoup dhumour, on est frappé par la pauvreté de la population dont lun doit vendre son vélo outil de travail pour acheter une machine à débiter des saucisses pour larrivée du pape, où un des rares luxes de lépouse de Beto est quil lui rapporte de lamidon de la frontière pour le linge. La débrouillardise et lincurable bonne volonté de Beto qui finira par transporter la cuvette des WC sur son dos en courant le matin de larrivée du pape, la solidarité entre les gens du village qui nont rien mais sentraident quand même à leur mesure, en font un récit extrêmement touchant dans sa simplicité et très drôle par son sens de lanecdote quasi Pagnolesque. Sur une musique géniale, un paysage ocre et vert, vastes étendues plantées au bout de nulle part, baraques et maisonnettes posées sur la terre, le tout dune grand beauté sauvage, on est totalement en empathie avec les personnages. Belles images touchantes et amusantes, entre drame et comédie, Beto la tête recouverte dune grande nappe en plastique comme un voile de mariée ou la tête dans le soleil couchant, les bras en croix, ivre dutiliser enfin une moto, la fille aspirante journaliste, enfermée à la cave mimant une émission de radio, Beto faisant répéter inlassablement à sa femme et sa fille, comme on jouerait une pièce de théâtre, laccueil des touristes qui se présenteraient pour aller aux toilettes. Et si le pape ne venait pas
quand tous se sont levés la nuit pour installer les stands et les comptoirs
Ce film sera distribué en France au printemps 2008 à loccasion de la visite du pape
en France
"Pleasure factory"*("Kuaile Gongchang") de Ekachai Uekrongtham (Thaïlande, vo en chinois)
Si on voulait faire vite, on pourrait dire que ce film se la joue, difficile de faire moins naturel et plus bricolé «made in artiste». Pendant un bon moment, on met des personnages en place de façon inutilement lente et compliquée, par exemple, on passe sans cesse dune scène à lautre sans raison, on coupe le son, on remet le son la caméra suit les uns, les autres dans des couloirs, des escaliers, façon film amateur. Partout, on vend du sexe, cest le sujet. Des jeunes femmes dans les rues la nuit adossées contre les murs, dautres enfermées quasiment nues avec des numéros dans des clubs, tristes caves à peine aménagées, des préposés qui demandent aux clients quelle nationalité, quelle spécialité, quelle couleur de peau, on nen finit pas de brosser le tableau. Puis, un brin de romantisme hors sujet vient simmiscer dans ce fatras, le jeune homme puceau rencontrerait lamour avec une prostituée aux cheveux longs, peu crédible mais complaisant. La fille dune prostituée sonnant chez sa mère tombe sur un client gras et vulgaire qui paye très cher pour linitier, la scène est horrible, la jeune fille quasiment asphyxiée par une fellation forcée se voit projetée violemment la tête contre le mur par le client furieux qui linjurie. Le soir, les prostituées se détendent en écoutant des chansons à la guitare, lune delle quon a vu au début du film en robe rouge cerise, talons assortis, payera le chanteur un prix exorbitant pour laccompagner chez elle. Ce sont les rares scènes fluides du film et seules les images de la mère prostituée allumant une cigarette avec la suivante, avec cette lassitude confinant au désespoir sur son visage que le réalisateur filme longuement, sont émouvantes. Dans lensemble, on retiendra plutôt un film lent, laid et livide dun réalisateur qui se rêverait sûrement en créateur de génie ne se posant pas de limites et dont il nous faut pour l’instant supporter les poses.
"Et puis les touristes"***("am ende kommen touristen") de Robert Thalheim (Allemagne)
Pour des raison nayant rien à voir avec le film, je nai pu rester quau début mais je pense que ça vaut la peine dy retourner… (Le premier film "Tout ira bien" de ce réalisateur est sorti le 16 mai)
Pitch. Un jeune homme de Berlin arrive faire son service civique à Auschwitz et se trouve affecté auprès dun vieillard de 80 ans rescapé des camps qui le reçoit fraîchement. Montré du doigt comme «lallemand», il trouve du réconfort auprès dune jeune femme interprète.
"LAvocat de la terreur"** de Barbet Schroeder (France)/Sortie le 6 juin 2007
On sait que Barbet Schroeder a toujours prisé le genre documentaire que ce soit le documentaire pur comme autrefois sur Amin Dada ("Général Idi Amin Dada") ou dans ses films avant la période américaine où il incorporait des séquences entières documentaires en y mêlant des acteurs (cérémonies vaudous dans "La Vallée", vrais pratiques et intervenants du milieu SM dans "Maîtresse") Pourtant, linterminable documentaire sur Jacques Vergès nest pas aussi palpitant que je lavais lu ici et là. Je mattendais à plus dinventivité, de sélectivité, et surtout plus de vitalité dans la façon de filmer et de monter les sujets. Les interviews de Jacques Vergès statique avec son sempiternel sourire moqueur et son art de la dissimulation ne mont pas fascinée, le personnage non plus, on la tellement vu et entendu sur ce registre dans des émissions de télé depuis des années
Le sujet est trop riche et rien ne dépasse, il semble quon ait déjà entendu ressasser tout ces scoops dhier même si cest de façon nettement moins précise. La partie la plus intéressante est le début de la carrière davocat de Vergès en Algérie dont on ne savait pas grand chose (pour ma part) et son mariage avec la révolutionnaire Djamila Bouhired. Epousant le combat anticolonialiste de lAlgérie, cause pour laquelle il milite depuis son adolescence à la Réunion, il se convertit à lislam pour se marier avec Djamila. Quelques années plus tard, Vergès, lassé dêtre le mari de
et de végéter comme avocat de province, disparaît pendant huit ans, réfugié sans doute au Cambodge. Quand il revient, il a perdu la foi et accepte de défendre les terroristes de tout horizon. On nest pas fâché que le film se termine au bout de 2h15
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