"Sans Sarah, rien ne va!" ("Forgetting Sarah Marshall") : comédie tragique

Nicholas Stoller, sortie 18 juin 2008
La Paramount ayant invité un certain nombre de blogs, comme elle le fait de temps en temps, à voir en avant-première « Sans Sarah, rien ne va! » (« Forgetting Sarah Marshall ») de Nicholas Stoller, j’y suis donc allée hier avec zéro références puisqu’on présentait le film comme dans la lignée de « 40 ans toujours puceau » ou « En cloque, mode d’emploi » de Judd Apatow, ici producteur du film,  et que je n’ai vu ni l’un ni l’autre. Ce n’est sans doute pas plus mal car j’avais l’approche du Candide en regardant cette tragédie de la rupture revue sur le mode de la comédie triviale. Car c’est de cela qu’il s’agit, on sait que les ressorts de la comédie sont les mêmes que ceux de la tragédie et le cinéma italien a compris depuis longtemps comment faire rire avec des situations catastrophiques. Ici, on présente un héros, anti-héros, Peter Bretter, compositeur de mauvaise musique de films, à qui il n’arrive que des tuiles, et en premier lieu, se faire larguer par l’amour de sa vie, l’actrice télé Sarah Marshall.Pour interpréter ce malheureux amoureux plaqué par la perfide actrice de « Scene of the Crime », une parodie des feuilletons américains, on a choisi une sorte de Danny Boon version US, c’est à dire plus grand et plus musclé mais absolument pas sexy, donc, tout le monde ou presque (sauf les bourreaux des coeurs…), devrait pouvoir s’identifier aux larmes amères de Peter Bretter (Jason Segel)…
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photo Paramount pictures

Démarrant sur Peter Bretter vautré devant la télé, s’empiffrant de cornflakes multicolores dans un saladier grand comme une cuvette, soudain dérangé par le coup de fil de Sarah à qui il ment qu’il mange de la salade et bosse comme un dingue, on arrive tout de suite à une scène que le réalisateur a fléché : « scène culte si possible » : Peter est nu quand Sarah débarque chez eux et refuse de s’habiller pour rester dans l’intimité quand il a compris qu’elle est venue lui annoncer qu’elle le quitte. Désespéré, Peter trouve refuge auprès de son beau-frère qui le coache. Après d’inutiles coucheries avec des femmes d’un soir qu’il aime moins que jamais, Peter décide d’aller en vacances à Hawaï. Le problème, c’est que la belle Sarah Marshall est arrivée dans le même hôtel de Hawaï avant lui avec son nouveau mec : un chanteur ex-junkie féru de zen et d’amour libre. A la réception de l’hôtel, Peter trouve immédiatement la solution en la personne de Rachel, suberbe brune type vahiné, exactement le contraire de la blonde et sophistiquée Sarah.


photo Paramount pictures

On se dit que ces nouvelles comédies sont un peu comme les anciennes, je regardais hier soir une soirée Adjani avec « La Gifle » (1974) et « Clara et les chics types » (1980), les ressorts sont les mêmes, Francis Perrin/Morillon dans « La Giffle » est cet amoureux transi, trompé par Isabelle Adjani avec son meilleur ami Rémi/Jacques Spiesser. Dans « Clara et les chics types »,  Charles/Christian Clavier est doublement cocu (on ne se lasse pas du gag du « mari d’Aimée ») et le beau Bertrand/Thierry Lhermitte se voit voler Clara/Adjani par son pleutre meilleur ami Mickey/Daniel Auteuil… La grande différence, c’est le language : c’est un peu comme le café qu’on servirait aux convives avec ou sans sucre
selon leur tranche d’âge. Un film comme « Sans Sarah, rien ne va! » est extrêmement pudique dans ce qu’il montre, c’est à dire à peu près rien, sauf des mises en situations, en revanche, le language cru, trivial, sexuel, est omniprésent. Question d’emballage… 

   

Pour le reste, on s’amuse quand même pas mal des malheurs de Peter épiant son ancienne fiancée dans les arcanes de cet hôtel club de Hawaï, les duplex avec le beau-frère sur internet sont assez savoureux, le rythme est vif, ça ne traîne pas, on est dans l’image utile à visée de ne jamais ennuyer le spectateur, assez fluide, efficace. Si les deux tiers du films sont sympas, le dernier tiers est plus poussif, hésitant, ce qui démontre bien combien le malheur est porteur de comique de situation car dans le dernier tiers, ça va s’arranger pour Peter, évidemment, et c’est là que ça patine… Pour un premier film, ça démontre le grand savoir faire US, scénario avec personnages secondaires bien développés, même si ce couple de jeunes mariés avec épouse nympho est plutôt lourd, situations variées, acteurs à qui tout le monde peut s’identifier, film grand public sage donnant l’impression d’être transgressif quand il n’en est rien. Si on veut prendre un exemple récent, ça ressemble un peu au dernier film des frères Farrely « Les Femmes de ses rêves » avec Ben Stiller, d’ailleurs, Judd Apatow, le producteur du film, a coécrit « The Ben Stiller show ».
Après la volée de bois vert misérabiliste de certains films de Cannes, ça fait du bien de se détendre et pourquoi pas avec ou sans Sarah? Le film est drôle, sans autre prétention que de faire rire, quoique ce soit partiellement faux… Le film est drôle à mourir, l’état où se trouve Peter sans Sarah, l’état que bien des gens connaissent, ont connu, connaîtront…

 

Notre note

3 out of 5 stars (3 / 5)

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Posted by:

Camille Marty-Musso
Créateur et responsable éditorial du site www.cinemaniac.fr, en ligne depuis janvier 2006.

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