The RECKLESS MOMENT

The reckless moment (Les Désemparés): Film noir sociétal

Max Ophüls, 1949

Pitch

Une femme au foyer, voulant sauver sa fille, fait face à un maître chanteur, noue des relations avec lui.

Notes

On voit d’abord les journées de Mrs Harper, femme au foyer débordée par les sollicitations incessantes des uns des autres. Lucia Harper, dont Tom, le mari, est en voyage d’affaires, vit avec son beau-père et des deux enfants. Un beau-père gentil mais intrusif qui n’a de cesse que de lui demander le pourquoi de ces déplacements, au point que même dans la maison, Lucia doit se justifier de ses faits et gestes. Le drame survient lorsque la fille, adolescente délurée, entichée d’un voyou minable, plus âgé qu’elle, en vient par dépit (apprenant par sa mère que le type renoncerait à elle pour de l’argent), à le tuer, dans le garage à bateau. Lucia Harper répare les dégâts et fait disparaître le corps en mer en le transportant la nuit sur un bateau de fortune. Mais la fille a écrit des lettres compromettantes… Un maître-chanteur en demande cher pour les rendre. S’en suit une relation troublée entre Lucia Harper et Martin Donnelly (le maître chanteur).

Confrontation de deux univers, deux classes sociales : Mrs Harper, archétype de la femme au foyer d’une société américaine «idéale», aliénante, des années 50 aux USA et le monde obscur des petits malfrats vivotant de combines et chantages (la maison cossue des Harper contraste avec l’hôtel miteux ou Lucia Harper rencontre Martin Donnely).

Le réalisateur fait le procès de cette Amérique en plein essor économique, versée dans l’une frénésie de de consommation, ce «Cauchemar climatisé» dont parlait Henry Miller… Lucia est plutôt la victime d’un sytème où la femme au foyer doit tout gérer, interrompue sans cesse par des demandes de son entourage, tout en restant pimpante et habillée comme une poupée, robes, manteaux, foulards, sacs à main, talons, on est loin des looks actuels et on comprend que cette période ait inspiré plus tard le réalisateur Todd Haynes.

Le film se passe à Balboa sur la côte est, pas loin de la très chic Harbor island, un univers clos composé de maisons bourgeoises inhospitalières pour l’individu non homologué, tel Martin Donnely, et qui le sait, finira, paradoxalement, par protéger Lucia Harper de son encombrante présence.

Le surprenant virage quasi-sentimental du drame est allusif, tout en nuances et en non dits …
Ce film, auquel le réalisateur apporte toute son expertise de l’expressionnisme allemand, est tourné en partie la nuit dans la pénombre du port, du hangar à bateaux, les plans longs comme celui où L rejoint M en montant un escalier extérieur sont sensuels, comme si elle allait rejoindre un amant. Mais rien ne sera dit ni fait. Il y a ce qui aurait pu être si cette distance sociale ne condamnait les deux personnages à la distance entre eux. Mrs Harper ne se laissera aller qu’une fois à son inclination, quand il est trop tard…

 

 

 

 

 

 

 

Et aussi

Max Ophüls fait partie des réalisateurs qui ont fui le nazisme, important leur manière de filmer à Hollywood où il passa huit ans, 5 films, signant des chefs-d’œuvre comme Lettre d’une inconnue (1948) avec Joan Fontaine et Louis Jourdan, d’après Stefan Zweig, Caught (1949) où il travailla déjà avec James Mason et The Reckless moment (1949) avec Joan Bennett et James Mason.

Il rentre ensuite en Europe où il réalise ses films les plus connus : La Ronde (1950), Le Plaisir (1952), Madame De 1953) et le somptueux et tragique Lola Montes (1955)

The Reckless moment avait un autre titre durant le tournage : The Blanc wall. Par ailleurs, après des screen tests auprès du public, la scène finale fut tronquée (l’arrivée de la police sur les lieux), une fin alternative fut également abandonnée (l’arrivée du mari à l’aéroport remplacée par Mrs Harper au tel avec son mari, ce qui était la bonne option, tellement plus forte).

Ce film a inspiré TODD HAYNES pour LOIN DU PARADIS.

 

Les Désemparés

Notre note

3.5 out of 5 stars (3,5 / 5)

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Posted by:

Camille Marty-Musso
Créateur et responsable éditorial du site www.cinemaniac.fr, en ligne depuis janvier 2006.

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