"Walk The Line" : Toute la musique qu'on aime …

James Mangold, 2006

Johnny Cash était une rock star avant l’heure. De son enfance pauvre où son père le détestait et sa mère aimait chanter dans les champs, il avait en lui le manque suffisant d’affection et de reconnaissance pour tenter de se consoler de l’inconsolable devant un public au superlatif. Le film commence sur les chapeaux de roues, pas un temps mort, du beau, du drame, du rythme, c’est le jour du concert de Johnny Cash à la prison de Folsom en 1968.
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On entend le vacarme des objets qu’on cogne, la rumeur de la foule, les guitares qu’on accorde, un mélange de l’univers du concert et de la prison. C’est aussi ce que disent les images en parfaite adéquation avec la bande-son : des projecteurs au loin comme dans un stade mais une lourde porte en bois, des gardiens à casquette, des couloirs, des barreaux, des pieds qui tapent le sol, des mains qui tapent la mesure Et le visage du Johnny Cash, concentré, avant d’entrer en scène

Retour à l’enfance, Arkansas 1944 : Deux petits garçons partagent tout : leur chambre, leurs rêves, leurs parties de pêche, les colères de leur père et les chansons de la famille Carter à la radio. John, le plus jeune voue une admiration sans bornes à son grand frère, Jack qui sait tout faire et tellement mieux que lui. Mais un jour de pêche, c’est le drame, Jack ne viendra pas et le père reprochera à John, douze ans, que ce ne soit pas lui «Dieu s’est trompé de fils, il a pris le meilleur» Toute sa vie, Johnny Cash se sentira coupable d’avoir pris la place de son frère, démoli par son monstrueux père qui le poursuivra de sa rancune.

Après son service militaire en Allemagne en 1952, Johnny Cash se marie avec Vivian, une petite bourgeoise qui ne croit pas à son avenir dans la musique et l’exhorte à être vendeur chez Home Equipment. Il enregistre néanmoins avec deux collègues de travail son premier disque « Cry, cry, cry » qui sera un succès. En tournée avec les Tennessee 2 puis 3, il fait la connaissance de June Carter : la petite fille de dix ans qui chantait à la radio avec The Carter family est devenue une chanteuse country. Ils ont un point commun car la mère de June lui a mis dans la tête que sa sur est meilleure chanteuse qu’elle comme le père de Johnny préférait son frère. Elle l’encourage à se revaloriser, il la pousse à reprendre le chant et pendant des années, Johnny Cash n’aura de cesse qu’elle l’épouse, bien qu’elle soit mariée et lui aussi… Dans cette époque puritaine, c’est sur scène qu’ils se regardent, qu’ils se désirent, qu’ils s’expriment. Johnny Cash lorgne June Carter avec un air extasié un peu benêt pendant qu’elle fait et surfait son numéro de charme. Comme les enfants artistes qui ont commencé trop tôt, June Carter ne sait séduire vraiment que devant un micro.

Portrait d’une rock star souvent défoncée, ivre, déprimée, accro aux amphétamines, alcoolique, qui passera quelquefois par la case prison. Ces prisons dont les détenus lui écrivent souvent pour lui dire qu’il les comprend. C’est ainsi qu’il décidera d’enregistrer un album live à la prison de Folsom, malgré l’avis de ses managers. Portrait d’une époque magique avec Jerry Lee Lewis, Elvis Presley, Johnny Cash, la naissance du rock, du country, du folk. Avec des maisons en briques et des rues sages des villes de province américaines des années 50, des cheveux gominés, des micros sur pied en acier, des cravates noires et des mocassins cirés. Avec les concerts dans des théâtres, les enregistrements dans des petits studios, pas de télévision mais la radio omniprésente, les tournées la nuit dans des vans inconfortables avec les fans et les groupies, les autographes à signer. Une population réac qui vomit le divorce, la drogue, la musique, un père sévère qui dit la prière à table avant le repas, leurs femmes au foyer soumises en robes et en chignon. Portrait d’une histoire d’amour absolu où June sera le seul repère de Johnny et lui insuflera la vie. Ils vivront ensemble cette union fusionnelle pendant 35 ans, June Carter est morte en 2003 et Johnny Cash quelques mois plus tard, laissant 1500 chansons et 500 albums dont le célèbre enregistrement à Folsom prison.

Les images sont très belles, on passe de la lumière jaune des intérieurs des maisons à l’univers verdâtre de la prison, le cadrage est précis, chaque image pourrait être tirée en photo, la reconstitution des années 50 est léchée, aucun effet gratuit, quelques gros plans des objets et des parties du corps correspondant à la bande son, c’est du bel ouvrage, ça fait plaisir ! Les chansons ont été réenregistrées par Joaquim Phoenix et Reese Whiterspoon, JP dit qu’il a eu beaucoup de mal à trouver la tonalité grave de Cash, ayant d’origine une voix aigue, pourtant le critiques trouvent qu’il le copie à l’identique, beau travail ! On regrette qu’il n’y ait que des morceaux de chanson, on reste un peu sur sa faim, ça va relancer les ventes des albums de Johnny Cash !!!

Les acteurs : Les acteurs sont superbes, Joaquim Phoenix est un acteur inspiré, une éponge qui se met dans la peau du personnage, possédé par le rôle. Reese Whiterspoon est délicieusement maniérée sur scène comme les artistes de l’époque, une poupée brune aux yeux bleus de porcelaine et fossettes au menton, frêle et forte, en robe rouge virevoltante et escarpins assortis, avec une aisance stupéfiante. Joaquim Phonix est le frère de River Phoenix, acteur culte mort il y a quelques années d’une overdose, bien qu’il soit agacé dans les interviews qu’on fasse la comparaison entre sa vie et celle de Johnny Cash, s’agissant de son frère ou de ses problèmes avec l’alcool. Il a joué dans dans des films grand public comme « Gladiator » (2000) et ou dans du cinéma d’auteur tel « All about’s love » (2003) de Thomas Vinterberg

Reese Whiterspoon a été révélée au grand public par « Sexe intentions » en 1999 et à Ryan Philips qu’elle a épousé cette année-là. Pour l’anecdote, l’actrice a déclaré qu’avec JP, ils avaient du mal à se supporter tant ils avaient répété et joué ensemble et qu’il trouvait qu’elle chantait trop fort

Le réalisateur James Mangold a tourné entre autres choses "Copland" "Kate et leopold" (2001) avec Meg Ryan et "Identity" (2003) avec John Cusack. Avec « Walk the line », il marche droit vers le succès, ou du moins la reconnaissance. J’en profite pour dire que j’ai été choquée, étant allée voir le film dans un grand complexe Gaumont de 13 salles de constater qu’il passait dans une très (trop) petite salle qui était comble, ce qui a gêné tout le début de la séance, les gens ne sachant pas où s’asseoir tandis que « Les Bronzés 3 » passaient dans une salle de 600 places Pas de risques que les directeurs de salles en prennent En conclusion, un très beau film tout public, sur le thème de l’amour, la mort, le folk, la trahison, le pardon, et surtout la rédemption par l’amour et la musique. A voir et revoir sans modération …

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Posted by:

Camille Marty-Musso
Créateur et responsable éditorial du site www.cinemaniac.fr, en ligne depuis janvier 2006.

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