"Comme t'y es belle" : Quatre filles et un portable

Lisa Azuelos, 2006

 

Heureusement qu’il y a Marthe Villalonga, ce sont les seuls et uniques bons moments du film ! Asphyxiée dans une combinaison blanche en train de faire une séance Cellu-M6 dans l’institut de beauté de sa fille avec la bécasse de service qui lui dit «je suis sûre que vous avez maigri!» ça console un peu du reste ! Téchiné ne s’y était pas trompé, cette actrice a un talent et un naturel à nulle autre pareils !
——Quatre fille et un téléphone portable, partout, collé à l’oreille en marchant, dans leur bain, sur une table de massage, en écoute mains libres en voiture, ça, c’est pour la critique de la société de communication

Quatre filles et quatre amants tous plus canon les uns que les autres, ça c’est pour coup de foudre à Passy Hill

Quatre filles et trois maris et des enfants dont on ne sait que faire, ça c’est pour le «problème de fond» : comment concilier une vie de feeeemmme avec une vie d’épouse et de mère Surtout quand on est une midinette qui pense «mes fesses, mon régime, mes crèmes et ils sont où les mecs baisables qu’on fasse pas tout ça pour rien?»

Pour passer le temps, jouons à classer ces quatre amazones. Qui est la moins odieuse des quatre amies ? Géraldine (Valérie Benguigui), la femme au foyer, brune et effacée, mariée à Gilles (Alexandre Astier), odieuse caricature de macho borné qui regarde des matchs de foot en hurlant «y a peno!» et veut lui interdire de travailler. Qui est la pire ? Léa (Aure Atika), vipère narcissique obsédée par la loose et la baise, exemple d’un de ses coups de fil avec une des quatre «je suis en pleine ovulation, j’ai trop envie de baiser !», réponse «achète-toi un god!». Qui est la plus neutre ? Nina (Géraldine Lakache), petite brune indolore pas encore mariée, amoureuse muette de son fanfaron de cousin que Léa coache en jetant toutes ses victuailles trop caloriques «c’est de la loose, pense glam!» (ceux qui lisent «Elle» me suivent). Qui est la plus hystérique? Sans hésitation Isa (Michèle Laroque) qui joue à «Venus beauté institut» dans son salon très chic où se retrouvent toutes ces perruches.

Isa, séparée du beau et riche David (Francis Huster), renverse un type en vélo, arrivée du prince charmant n°1 : un séduisant anglais, qui, non seulement, va brûler d’amour pour elle aussitôt, mais va lui éviter un redressement fiscal, c’est pas beau la circulation dans Paris dans le XVI° arrondissement ? Léa, séparée du beau et célèbre Frédéric Beigbeider (dans son propre rôle), qu’elle piste en photo dans «Public», le revoit en cachette et pour l’arrivée du prince charmant N°2, on attendra un banal rendez-vous de routine chez un médecin… Nina, la seule à être amoureuse d’un homme du clan, le séduira en troquant son chemisier pour un décolleté plongeant et un massage expert, aussi simple qu’un coup de fil, arrivée du prince charmant N°3. J’ai gardé le meilleur pour la fin : imaginez une sorte de dadame en talons et brushing plats, pas sexy pour un sou, qui est en retard pour aller chercher ses enfants à l’école, pas de problème, un parent d’élèves les recueille chez lui, c’est une bombe ! Un mec à tomber qui va justement tomber amoureux d’elle presque plus vite que l’anglais d’Isa, arrivée du prince charmant N°4 et fin du quarté gagnant. C’est pas possible que les américains n’achètent pas un scénario aussi nunuche, mêmes eux n’auraient pas osé !

Le prétexte du film, c’est de relire «La Vérité si je mens» au féminin dans le milieu sépharade, de passer du Sentier au triangle NAP, et c’est là qu’on appelle la savoureuse Marthe Villalonga à la rescousse pour camper la mère d’Isa et Géraldine : en baskets argentées et petit pantacourt noir, voire en blouson de cuir et jean, elle est too much ! Quel abattage pour la Jacqueline Maillan pied-noir mais pas seulement, cette actrice unique a une exceptionnelle intelligence du jeu, en mère de castratrice de Guy Bedos dans «Un Eléphant ça trompe énormément», elle était inénarrable, ici, elle assure, grave ! (pardon mais on l’entend tout le long du film).

Le grand gag du film, c’est l’idée qu’à Isa de se pacser avec la femme de ménage maghrébine sans papiers pour l’empêcher d’être expulsée, ce qui nous donne droit à un sinistre cliché : plan d’une façade d’un HLM en banlieue avec antenne parabolique sur un tristoune petit balcon pour introduire une visite dans la famille de Latifa, bonjour les clichés, manque que la «racaille»! Un gag qui s’étire du tout début du film au générique de fin, un vrai investissement pour la scénariste Est-il besoin de préciser qu’on ne joue que sur les archétypes : la femme au foyer qui ne connaissait pas son malheur, la célibataire pas célibattante, la femme orchestre plus hystérique qu’énergique, la fashion-victime délurée qui n’a du cur que pour ses copines.

Quand elle ne sait plus quoi filmer, la réalisatrice passe en mode avance rapide du magnéto, elle enchaîne les images en musique avec tous les protagonistes vaquant à leurs petites affaires de cur et de beauté (j’ai compté cinq ou six séquences). La BO va sûrement faire un tabac ! Céline Dion, «L’Envie d’aimer», Laurent Voulzy et Véronique Jeannot, Britney Spears Le reste du temps, c’est filmé à la va comme je te pousse, ne sachant pas quoi faire du people Frédéric Beigbeider, on le filme derrière une vitre en train de gesticuler et on n’entendra pas le son de sa voix.

Hormis Marthe Villalonga, il y a peu de chances qu’une des quatre actrices soit nommée aux Oscars Michèle Laroque s’enfonce dans un pastiche outré d’accent et de gestuelle pied-noir telle qu’elle l’a connu lors d’un premier mariage (voir ses interviews), survoltée et cabotinante, elle tient là son plus mauvais rôle. C’était bien la peine d’engager le talentueux Francis Huster pour lui faire faire quasiment de la figuration, sa photo sur le piano de son ex-épouse aurait fait amplement l’affaire. La réalisatrice, Lisa Azuelos, fille de Marie Laforêt, n’est pas Christian Vincent du délicieux «Quatre étoiles» de la semaine dernière…

Ce film m’a paru plus long qu’ «Autant en emporte le vent»… je serais curieuse de savoir sa durée exacte, pendant la première demi-heure, il demeure encore un vague espoir que ça s’améliore et, la pellicule défilant, c’est de plus en plus fastidieux à regarder d’autant que la réalisatrice arrive à une absence totale de rythme. Dans la pléthore de comédies qui s’est abattu sur la France depuis janvier, on peut faire impasse sur ce pensum à l’eau de navet.

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Posted by:

Camille Marty-Musso
Créateur et responsable éditorial du site www.cinemaniac.fr, en ligne depuis janvier 2006.

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