"Lucy" : Lucy in the sky with diamonds…

focus film Henner Winckler, 2006

Pitch

portrait d'une jeune mère célibataire de 18 ans tiraillée entre ses
responsabilités nouvelles et l'envie de sortir avec des gens de son
âge, un cinéma au plus près du réel de l'excellente nouvelle vague
allemande.

Portrait
d’une jeune mère célibataire de 18 ans, Maggy, qui voudrait vivre comme
toutes les ados de son âge tout en s’occupant de son bébé mais pas
trop…

 

Lucy a quelques mois, son père, un ado de l’âge de Maggy,
s’est défilé, on le comprend par quelques mots échangés (lors des
premières images du film) dans un parc entre deux jeunes gens, Maggy
dit à un blondinet « pour un chien, tu as les moyens » et il répond que
c’est un cadeau, ce chien, elle objecte qu’il faut le nourrir, que le
chien mangera beaucoup en grandissant… Elle rappelle néanmoins Daniel
pour garder leur enfant quand l’envie de sortir prend le dessus. Dans
une boite de nuit, elle rencontre Gordon et emménage avec lui et Lucy.
Mais la vie de famille a rapidement raison de la bonne volonté du
nouveau copain.

—–

Dans ce film pur et tranchant comme une lame,
le réalisateur esquisse plus qu’il ne dessine le parcours d’une enfant
qui a un enfant et ne sait pas très bien quoi en faire pour continuer à
vivre sa vie sans entraves tout en assumant ses nouvelles
responsabilités… Les épreuves et les difficultés de Maggy sont
traitées par une chronique du quotidien observé à la loupe que le
spectateur jugera sur pièces. Le bouleversement que constitue l’achat
d’un lave-linge dans la vie de célibataire de Gordon, un appareil
flambant neuf qu’on oubliera de brancher, les tâches domestiques
répétitives, la surveillance de l’enfant qui prend toute la place,
l’absence d’intimité dans l’unique pièce du studio de Gordon,
l’omniprésence de la télévision qui réunit le couple sur le canapé,
l’écran de l’ordinateur de Gordon demeurant sa seule évasion perso.
Les
relations tendues avec la mère de Maguy sont traitées de la même façon
par la mise en scène des micro-évènements de la vie : les petits
déjeuners de Maggy avec Gordon sous le toit de la mère qui fait la
gueule, le non dit entre la mère et la fille qui explose « je t’ai déjà
entendu baiser, c’est toi qui a commencé », la dureté de la mère qui
voudrait refaire sa vie aussi, l’indifférence aimable du personnel de
la crèche, les copines qu’on perd de vue, les copains de bringue qui
raillent Gordon.

Ni émotion ni pathos mais un constat clinique
de la situation ni réjouissante ni dramatique, soumise au rouleau
compresseur de l’usure quotidienne. Articulé autour de Lucy, l’enfant,
le film se focalise sur Maggy dont on citera à peine le prénom, son
statut de mère-enfant ayant pris le dessus.

De la vie de Maggy
avant la naissance, on ne dira pas grand chose explicitement mais une
foule de petites phrases et de mises en situation y font référence :
l’absence de père en héritage… pas d’homme dans l’ombre de la
solitude de la mère de Maggy, un Daniel ex-copain, père putatif de
Lucy, démissionnaire au premier plan du film… Maggy est bien partie
pour reproduire le schéma maternel… L’impossibilité pour Maggy
d’apprendre un métier avec un enfant à charge, illustrée par les
rendez-vous de Maggie avec sa copine en apprentissage de la coiffure…

Des
sentiments de Maggy envers les hommes de sa vie, on n’en saura encore
moins sauf sa déception presque muette : Gordon chassera Daniel,
lui-même remplacé par un autre, des hommes qui semblent
interchangeables… La seule constante sera Lucy, la petite fille
surnuméraire qui demeure le seul point d’ancrage de Maggy.

Second
film du réalisateur Henner Winckler après « Voyage scolaire », ce film a
été présenté au festival de Berlin 2006 dans la section « forum des
Berlinales ». Présenté également au festival Paris-Cinéma dans le cadre
du renouveau du cinéma allemand, « Lucy » a les couleurs de cette
nouvelle vague de cinéastes introvertis et lucides, comme Christoph
Hochhäusler (« Le Bois lacté » et « L’Imposteur »)
et Valeska Grisebach (« Sehnsucht » en compétition à Paris-Cinéma), qui
font un cinéma factuel sans artifice ni démontration, tout en retenue,
utilisant les sons réels et les images d’un quotidien ancré dans une
réalité ni embellie ni enlaidie, pariant que cette réalité est souvent
plus parlante que la fiction…


 

Notre note

3 out of 5 stars (3 / 5)

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Posted by:

Camille Marty-Musso
Créateur et responsable éditorial du site www.cinemaniac.fr, en ligne depuis janvier 2006.

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