"Une Epopée" : gestion du capital couple
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François Magal, sortie le 9 juillet 2008
C’est un film qui appartient aux récentes générations qui sacralisent le couple, sorte de capital qu’il faut faire fructifier et se garder de mettre en danger avec de mauvais placements en bourse… Comment stocker l’amour dans de bonnes conditions de conservation, ne pas se mettre dans la situation de constater qu’on a rien en commun et que ça va planter un jour, comment éviter les risques et pourquoi pas viser le risque zéro, car aujourd’hui, on « gère le capital amour », en deux mots…Ainsi, au lieu de rester à Paris sans se mettre à l’épreuve du changement météo, un couple, qu’on présente comme angélique, part pour l’Irlande avec leur petit garçon et un projet : The Art forest, il planterait la forêt, elle y mettrait de l’art, projet abstrait, métaphore de leur projet de vie ensemble. Il aime la nature, elle préfère la ville, ils n’avaient pas eu l’occasion de s’en apercevoir, leur séjour dans cette petite ville côtière irlandaise va le révéler comme un tas d’autres choses qui vont émerger en changeant d’habitat, d’habitudes…
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photo Initial distribution
Lui va tenter quelques démarches pour planter sa forêt, se lier avec des voisins, faire des petits boulots en forêt, des tiers qu’on ne verra vraiment de plus près que quand ils s’en vont car, bien entendu, l’entité couple ne va pas résister à ce déracinement de Paris à la campagne ou du moins se fragiliser dangereusement. Très vite, elle va trouver un job trois jours par semaine à Cork, il va garder le bébé, enfin, Rose, la nounou irlandaise, va le garder. L’arrivée des parents de Laure crée un événement dans le film, son père enthousiaste, sa mère faisant la gueule, un peu Laure vingt ans plus tard… Le tournant du film est quand Laure cherche « split » dans le dictionnaire, voilà, les dés sont jetés, ça veut dire coupure, fissure, etc…
Le parti pris est de faire léger et elliptique, de mettre en scène le non dit, par exemple, on apprendra qu’ils s’appelent Paul et Laure au bout de plus d’une heure de film, c’est pas trop lourd? Vers la fin du film, on saura que Paul est écrivain… Dès le départ (bienvenue à la suite des aventures du cinéma comportemental), on voit de but en blanc un couple embarquer leur voiture dans ce qu’on suppose être la cale d’un car-ferry, ensuite on voit une ville dans le brouillard et la jeune femme sur le pas d’une porte qui appartient sans doute à une maison, la porte. Puis, lui devant son PC, elle assise sur un canapé, ça doit être un salon, enfin, le téléphone sonne et on va entendre une voix, jusque là, le film était muet. Pas bavard pour longtemps, les échanges sont des regards, des moues, des silences, le non dit on vous dit, c’est tendance.
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photo Initial distribution
Côté acteurs, le casting est inconnu, les comédiens statiques, les échanges monocordes, un peu comme une lecture de dialogues avec une vague inflexion, un parti pris, encore un, qui donne une sensation d’anti-naturel bien qu’on soupçonne l’objectif de cette direction d’acteurs : ils n’ont rien à se dire, ils se forcent (elle sourit sans cesse, par exemple), ils sont complices malgré tout, etc… Ce qui est voyant, c’est qu’on enfonce le clou qu’ils ne se touchent pas, se parlent à peine, ils sont partis comme une famille, à l’arrivée, ce sont deux étrangers, ils n’en reviendront pas indemnes.Pour les amateurs du film intimistissime tournant le dos à l’état du monde et pour ceux qui ne supportent pas le bruit, ils ne seront pas dérangés… Et aussi quelques rares beaux plans en forêt à apprécier…
Notre note
(2 / 5)
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