"Transamerica" : Le dernier mélo à LA

Duncan Tucker, 2006

Quand le fils de Stanley, drogué, prostitué, violé par la mari de sa mère suicidée, veut coucher avec Bree en ignorant qu’elle est son père qui a changé de sexe et pas cette inconnue qui l’a fait sortir de prison, le tout se passant chez ses grands parents tarés avec sa tante, ex-junkie, on dit stop ! On l’aurait bien dit avant mais là on a passé la limite.

——On se fait de fausses idées sur la vieillesse, en arrivant au cinéma, j’ai été étonnée que la petite vingtaine de personnes clairsemée dans la salle appartienne au troisième âge avec cheveux blancs et mis en plis, qu’avaient-elles bien pu lire sur le film qui les ait poussé à sortir et qu’avaient donc pu bien lire les autres qui les en ait dissuadés ?

Sabrina Osborne (Felicity Huffman), quadragénaire solitaire en tailleur mauve, est sur le point de se faire opérer pour devenir définitivement une femme. Elle a déjà subi des opérations de chirurgie esthétique appelée féminisation du visage, prend des hormones depuis trois ans et s’habille en femme depuis longtemps.

Les premières images du film montrent Bree en train d’essayer de modifier sa voix à l’aide d’une méthode enregistrée, la caméra passe longuement sur les ongles longs rose nacré, le peignoir en satin blanc, le soutien-gorge rembourré, le maquillage avant de montrer le visage de Bree. Elle s’apprête à obtenir le dernier certificat de la psychologue l’autorisant à subir son opération de réassignation sexuelle la semaine suivante quand le téléphone sonne : c’est un jeune homme qui veut parler à son père, Bree se défile.

Bree, qui s’appelait Stanley dans sa jeunesse, ignorait qu’elle avait un fils de 17 ans et la psychologue s’en étonne d’autant plus qu’elle lui avait déclaré être vierge. Stanley avait pourtant eu une aventure avec une étudiante il y a des années. Poussée par la psychologue, Bree rappelle le jeune homme et on lui répond qu’il est en prison à New York. Elle prend alors un avion de Los Angeles pour New York pour payer la caution de son fils mais n’ose pas lui dire qu’elle est son père. Le fils, Toby (Kevin Zegers), est un prostitué pour hommes qui vit dans une sorte de squatt crasseux avec trois junkies, crack ou héroïne. N’ayant pas les moyens de lui payer un billet d’avion, Bree, qui se fait passer pour un membre d’une congrégation religieuse, décide d’emmener son fils en voiture à LA : le road movie a commencé, encore un!

Pour aller de NY à LA, on traverse un certain nombre d’états dont on ne verra pas grand-chose par la vitre sale de la vieille voiture, d’autant que l’image l’est aussi, comme si on avait utilisé une pellicule périmée, une image de téléfilm, pas de «Desperate housewives» mais plutôt du genre «Peyton place». La grande idée du scénariste, c’est que les hormones ayant un effet diurétique, Bree va demander à faire de nombreux arrêts et à chacun d’eux, le suspense est là : le fils va-t-il voir le pénis de Bree quand elle ôte son collant blanc? On note par la même occasion le côté documentaire : les américains voyageraient tous avec un rouleau de papier toilette (ça se reproduit avec d’autres personnages).

Comme par hasard, on va passer près de la ville d’enfance du fils, hasard aussi, on passera ensuite à deux pas de la maison de parents de Bree. On apprendra au passage que le beau-père ignoble abusait de Toby, quant aux parents de Bree, ils sont indescriptibles. La mère de Bree a l’air de Line Renaud en plus grosse plus bronzée plus blonde, en bermuda et sweat turquoise, occupée à observer la queue de son chien qu’elle compare à un pénis à pelage noir, et à dire le Benedicite avant les repas, faisant partie d’une église de type scientologique. Le père de Bree, qui, pour sa part, fréquente la synagogue, n’ouvrira la bouche que pour confier à son petit-fils que la lecture assidue de revues porno dans les toilettes a perturbé sa sexualité. Pour couronner le tout, la sur de Bree est une ancienne junkie agressive qui sort de cure de désintoxication. C’est dans cette ambiance folichonne que le fils veut soudain coucher avec Bree, n’ignorant plus qu’elle est encore un homme mais ne sachant pas encore qu’elle est son père. PS. N’ayant pas assez noirci le tableau, on retrouvera le fils, avec un brushing teint en blond dans un tournage d’un film X «Surfanalogie» où la réalisatrice lui demande si il a bien pris son Viagra

Ce n’est pas le peine que je prenne la précaution oratoire, si je puis dire, de rassurer les lecteurs que je peux éprouver de la compassion pour des gens qui souffrent et que ce ne sont pas plus les transexuels que les prostitués que je stigmatise, mais de qui se moque-t-on avec ce mélo sordide et sinistre, indigeste ratatouille de tous les maux de ce monde, mal filmé, mal dialogué, lent, long et assommant ?

Ce film n’a qu’une ambition : celle du rôle à Oscar, mission presque accomplie puisque Felicity Huffman, sortie brusquement de l’anonymat avec le succès planétaire de «Desperate housewives» (elle y joue Lynnette Scavo), interprète ici un rôle défi d’une transexuelle qui fut un homme, le tout joué par une femme. Pour cela, l’actrice a modifié sa voix pour une tonalité beaucoup plus grave mais, pour avoir vu toute la saison 1 de DH en VO, on la reconnaît très bien. Le maquillage est également très élaboré avec des oreilles décollées, la lèvre supérieure gonflée comme après trop d’injections de collagène, la face congestionnée dans son ensemble comme ayant abusé de la chirurgie esthétique, des perruques brunes raidies. La gestuelle de FH est celle de tout acteur masculin voulant jouer un homosexuel maniéré avec des petits gestes frileux, le sac qu’on ramène sur sa poitrine, cette façon de se déplacer en marchant sur des ufs. On est bien loin de la performance de Philip Seymour Hoffman dans «Truman Capote». Le vestiaire de Bree, essentiellement composé de rose Barbie, de blanc et de violet, vanity case rose bonbon compris, ne l’aide pas à se défaire de la caricature.

Le réalisateur, Ducan Tucker a tourné ce film en 2004 avant que FH soit célèbre qui déclare modestement cette semaine dans «Elle» qu’on l’a choisie à l’époque parce qu’elle n’était pas chère, elle a l’air d’ailleurs fort sympathique dans cette interview. Le film, bien que non issu des studios Miramax, a été pourtant distribué par Bob et Harvey Weinstein. Il a reçu le prix du scénario au festival du film américain de Deauville. Il semble également que ce film a plutôt de bonnes critiques

Pour ma part, merci mon Pass de n’avoir pas payé ma place, quelles raisons aurait-on de le voir sinon de suivre le Télérama, je n’en trouve aucuneSauf deux choses : «Rebel, rebel» de David Bowie pendant générique et cette phrase en exergue «ce qu’on ne peut pas changer, c’est le passé» L’alternative cette semaine était d’aller voir «Camping», je passe mon tour.

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Posted by:

Camille Marty-Musso
Créateur et responsable éditorial du site www.cinemaniac.fr, en ligne depuis janvier 2006.

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