«Sollers Point, Baltimore » : dans la ville désertée
Pitch
L’impossible réinsertion dans un des quartiers de Baltimore les plus démunis d’un jeune homme de 26 ans qui a passé deux ans en prison.
Notes
Malgré l’histoire individuelle d’un jeune homme récemment sorti de prison dont on va suivre les étapes d’une impossible réinsertion, le réalisateur, lui-même originaire d’un quartier de Baltimore est obnubilé par sa ville et sa déchéance (ville qu’il a déjà filmée dans presque tous ces films précédents) et ce qu’il en est advenu après que les prospères usines de sidérurgie et de construction automobile (telle Général motors) aient fermé leurs portes dans les années 70/80 (comme à Détroit) et laissé sur le carreau de milliers d’individus désemparés, désormais sans emploi… Cette fois-ci, il a choisi, de filmer, non pas son quartier d’enfance mais celui extrême en tout de Sollers Point, quartier excentré, enclave afro-américaine au fort taux de chômage, en proie au racisme, aux trafics en tout genre, où son grand-père y était ouvrier dans une usine du temps de l’apogée de la sidérurgie.
Un film personnel à plusieurs titres. Baltimore, la ville natale, aujourd’hui désertée par les usines, grande pourvoyeuses d’emplois, qui avaient fait sa fortune dans les années 40/50. Un anti-héros du film qui ressemble au réalisateur ou plutôt à qu’il aurait pu devenir, si…
Keith, 26 ans, est montré des la première scène écoutant du Heavy Métal dans sa chambre avec un bracelet électronique à la cheville, il est donc en liberté conditionnelle, censé faire un apprentissage de climatisation qui l’assomme. Ses relations avec son père sont tendues, sa mère est morte depuis longtemps mais beaucoup de gens l’accueillent à bras ouverts : ses grand-parents maternels, sa sœur qui a quitté la ville mais vient le voir, lui donne une vieille voiture. Il voudrait bien aller à l’anniversaire de sa nièce mais son officier de probation le lui interdit. Tristesse. Très vite, viré du stage de clim, viré par sa fiancée qui ne veut plus le voir (touchantes scènes d’affection avec leur chien adoré qu’ils avaient tous les deux adopté et dont elle s’est occupé durant son incarcération). Tristesse, incompréhension. Alors, Keith reprend ses vieilles habitudes dans les bas-fonds du quartier où il semble connaître tout le monde. Et, très vite, Keith, cède a des accès de violence du type rodé à la pratique de la violence intense en prison. Mais justement, le trio qu’il a connu en prison où ils formaient une sorte de clan ne veut pas le lâcher à leur sortie. Un «détail» qui va provoquer sa perte…
Et aussi
Film emblématique du cinéma indépendant américain à faibles moyens, celui-ci émerge du lot. Avec un casting ébouriffant : McCaul Lombardi, l’acteur encore peu connus durer…) qui joue Keith est une «bombe» à tous les sens du terme, la présence de John Belushi dans le rôle du père est un grand plus (très belle et sensible scène finale d’un père plus désemparé qu’hostile qui veut protéger son fils malgré tout…), tous les seconds rôles parfaitement crédibles. Filmé nerveusement, caméra à l’épaule, le réalisateur ne lâche pas son personnage principal pour lequel le spectateur développe une véritable empathie, d’autant que l’acteur est tellement séduisant et charismatique (trop, peut-être?), cette histoire somme toute assez banale devient alors captivante. D’autant que tout sonne vrai. D’autant que le réalisateur sait filmer et réalise des plans magnifiques de sa ville tant aimée, aujourd’hui en perdition…
Du beau cinéma Indé, ça existe toujours…
Ce film a reçu le prix du jury du long-métrage au dernier Champs Elysées Film Festival.
Notre note
(4 / 5)
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