Mission impossible Dead Reckoning part.1 : La Surenchère

Christopher Mc Quarrie, sortie 12 juillet 2023

Pitch

Ethan Hunt et son équipe de l’IMF ont pour mission (impossible) de sauver l’humanité d’un ennemi qui a le pouvoir de contrôler sa perception de la réalité.

Notes

1. Le Tour du monde promo (éléments du film en exergue) 

La tournée promotionnelle de MI a débuté dans la ville éternelle : Rome, où toute l’équipe du film avait pris ses quartiers pour le WE au légendaire hôtel Hassler dans le centre ville, Piazza di Spagna ; les fans attendaient aux alentours de l’hôtel la sortie de Tom Cruise, à la fois accessible, empathique, se prêtant bien volontiers au jeu des autographes et des selfies, et inaccessible dans un système où aujourd’hui un aréopage surnuméraire entoure les stars, agents, attachés de presse, gardes du corps, etc.

Pourquoi débuter par Rome?

Une partie du film a été tournée en Italie, à Rome, notamment, pour une double  poursuite en voiture dont celle dans une mignonne Fiat 500 jaune vif, devenue star du film à part entière, mais aussi à Venise, où l’équipe fut consignée durant le Covid (le tournage en Italie démarré à la veille du confinement), à Abu Dhabi et en Norvège (lieu censé correspondre aux Alpes autrichiennes, l’autorisation de tourner ayant été refusée à la production durant la pandémie). 

C’est en Norvège que Tom Cruise exécute la cascade la plus extrême de toute sa carrière : Cet incroyable saut à moto dans le vide (Basejump) de falaises immenses et escarpées avec seulement 6 secondes pour ouvrir son parachute (à 150 mètres du sol). Le making-off de cette cascade, mis en ligne il y a des mois, montre sa préparation (outre, en amont, des mois de motocross et de Speedflying). Tom Cruise sur sa moto (Honda), regarde la caméra en plaisantant : «Je mets mes ears pour ne pas m’entendre crier». L’humour en toute circonstance…Concentration, léger balancement de tête, il démarre ; à mi-chemin d’une rampe très étroite (à 1200 kmh au dessus de la mer), il se met debout sur la moto, prêt à balancer l’engin et à sauter dans le vide. L’acteur raconte qu’il ne pouvait pas avoir de compteur sur la moto, car il n’aurait pas eu le temps de le regarder, assigné à se concentrer sur l’horizon. Pour l’anecdote, ce perfectionniste aurait refait six fois cette cascade.

Tom Cruise in Mission: Impossible Dead Reckoning Part One / from Paramount Pictures and Skydance.

Tom Cruise in Mission: Impossible Dead Reckoning Part One / from Paramount Pictures and Skydance.

L’Italie pour MI7, la France pour MI Fallout, etc. 

Tom Cruise choisit ses AP en regard des lieux de tournage de ses films ou à peu près… Ainsi, après Rome, ce fut Londres (que l’acteur affectionne particulièrement), Abu Dhabi (où il a tourné plusieurs scènes de MIDR1 et dans le désert et dans l’aéroport flambant neuf, avant son ouverture, et en ville sur la tour géante de la métropole), Séoul, Sydney (3 juillet, il y a fêté son anniversaire sur scène, l’équipe du film lui ayant préparé une surprise), et le 10 juillet, dernière date du marathon promotionnel, New York, la ville de ses débuts, il avait 17 ans.

À Rome, en élégant costume bleu Nattier (identique à celui qu’il portait à Cannes en 2012), sans doute signé Brioni, TC a harangué les foules depuis le sommet des marches, tapissées de rouge, tout en descendant les escaliers de la place d’Espagne, livrant un discours, non pas centré sur la promo du dernier volet de MI, mais axé sur un plaidoyer en faveur de la sortie des films en salles. Ce cinéma au circuit traditionnel, distribué sur grand écran, modèle aujourd’hui menacé (le prochain Michael Mann, avec qui Cruise avait tourné Collateral, sera distribué en streaming sur Prime video), la star se veut en être le garant, le succès pharaonique de Top gun Maverick lui en donnant la légitimité (sans parler de l’accolade fraternelle de Spielberg au récent déjeuner des Oscars qui a fait le tour des médias). En visionnant les vidéos de l’évènement, m’est venu, néanmoins, à l’esprit l’image Napoléonienne en Égypte avec la célèbre phrase, reprise, déformée à l’envi : Du haut de ces pyramides…

Fashion week-end…

Plus tard, l’équipe du film au complet, les 4 actrices très élégantes, en satin noir (Hayley Atwell), en sleepdress or (Vanessa Kirby) en satin nude (Pom Klementieff), en velours noir rétro (Rebecca Ferguson), ce qui vaut d’être mentionné quand on a vu défiler les délires des couturiers, type une veste de costume sur peau nue, sans pantalon (la nouvelle tendance, quand il n’y a plus rien à ajouter, on soustrait) et des talons hauts d’équilibriste, sur les Marches de Cannes.

Masculin, féminin…

Une des grandes nouveautés de MIDR1, c’est l’hyper-féminisation du casting avec quatre actrices dont deux nouvelles venues, et, aucune d’entre elles n’est américaine. Si les spectateurs connaissent bien la suédoise Rebecca Ferguson (dans le rôle d’Ilsa apparue dès MI Rogue nation), l’anglaise Vanessa Kirby (La Veuve blanche, MI Fallout), ils n’ont jamais, a priori, entendu parler des deux nouvelles recrues de MIDR1 : l’actrice britannique Hayley Atwell (Grace) et la française Pom Klementieff (Paris) (toutes deux identifiées néanmoins des fans de l’univers fermé de Marvel). Une situation qui pourrait bien changer : Après Londres, Tom Cruise a poursuivi sa tournée mondiale avec ses deux nouvelles recrues, Simon Pegg (de la plupart des MI), ami de la star, et le réalisateur Christopher McQuarrie. McQuarrie (scénariste de Usual suspects), a rencontré Tom Cruise sur le tournage du film Walkyrie dont il était co-scénariste, a débuté sa collaboration étroite avec Cruise, d’abord en qualité de co-scénariste (MI Ghost Protocol), puis, a réalisé les deux derniers MI (MI Rogue nation et MI Fallout). 

Et ce n’est rien de dire que Tom Cruise a mis en valeur, non seulement son réalisateur, désormais complice (dont les spectateurs savaient à peine à quoi il ressemblait) et les nouvelles appelées de la saga, et cela à chaque étape de la tournée officielle… Demain, les actrices Hayley Atwell et Pom Klementieff seront également, grâce à Tom Cruise, des stars en devenir, d’autant que le film leur fait la part belle…

Soit dit en passant, on ne peut s’empêcher de penser qu’après les Charlie’s Angels d’antan (la série Drôles de dames des années 70), on a ici, dans la sage MI, (d’après la série MI des années 60/70 dont Cruise, producteur, a racheté la franchise), les quatre Tom’s Angels (et plus…) entourant celui qu’on considère désormais comme la dernière la star Hollywoodienne.

 

2. Plongée en apnée dans MIDR1 

Synopsis

À la différence des précédents opus, l’ennemi qui menace le monde et qu’Ethan Hunt (si il accepte la mission…) et son équipe de l’IMF doivent neutraliser, est interne. La première scène d’avant-générique donne le ton, effleurant la teneur de cette menace, un sous-marin s’auto-détruit… Difficile de ne pas spoiler. On dira seulement que la dernière scène, en complément  direct de la première, peut déboucher sur deux scénarios : MIDR1 peut être envisagé comme un film en soi avec une fin semi-ouverte ou comme un film ouvrant nécessairement sur une seconde partie : MIDR2 (sortie juin 2024, le film est déjà tourné).

Mon avis sur le film 

«Life is the sum of our choices and we cannot escape the past»
(En exergue du film)

Ethan Hunt va se confronter à un fantôme de son passé. Gabriel. Celui qui avait exécuté Marie, très proche d’Ethan… D’ailleurs, Ethan semble lui-même être devenu un fantôme de ce passé auquel il ne plus échapper, qu’il va devoir affronter.

Il y a dans ce film une dimension sociétale, quasiment philosophique, rarement abordée dans un film d’action, et, cela, grâce à un scénario particulièrement brillant, en prise avec les évolutions technologiques contemporaines à haut risque : l’IA, traitée ici sous le prisme d’un film d’espions mercenaires sanguinaires (ou pas) à la solde d’un gouvernement mondial qui voudrait contrôler l’humanité, sous l’angle pervers de la perception qu’ont les humains de la réalité ; un projet délirant (mais, malheureusement, d’actualité), que combattraient Ethan Hunt et son équipe. Dans MIDR1, la menace pour l’humanité n’est pas extérieure mais intérieure.

La mise en scène, exceptionnelle dès la première image, colle à ce scénario modernisé et périlleux par rapport aux épisodes précédents. McQuarrie m’a bluffée et cela dès les premières images. À chaque période du film, une tonalité différente, le bleu marine des fonds marins, la chaleur ambre du désert, la froideur bleutée de la Norvège.

La féminisation du casting est excessive mais cela correspond sans doute et aux attentes supposées des spectateurs et au plaisir de Cruise de s’entourer, tel James Bond*, de jolies et jeunes femmes. Un projet évolutif si l’on en croit les «confidences» de Cruise et McQuarrie sur leur façon de travailler avec réécriture du script, si nécessaire, au fur et à mesure, en fonction de l’objectif scénaristique visé ; l’injection d’idées nouvelles ou le développement d’un rôle, modifiant un récit de base et débouchant sur un scénario bis remanié. À noter, qu’hormis le personnage de Gabriel, les quatre femmes qui gravitent autour d’Ethan Hunt agissent davantage sur un mode offensif et les hommes plutôt sur un mode défensif. L’inversion des rôles ancrés dans l’imaginaire collectif…

Pom Klementieff in Mission: Impossible Dead Reckoning Part One / from Paramount Pictures and Skydance.

MIDR1 / photo Paramount

MIDR1 / photo Paramount

 

* Si d’aucuns trouveront le film Bondien, Ethan Hunt, à la différence de 007, ne séduit ses conquêtes que platoniquement. Il y a bien des rapprochements, de rares regards, mais le nez sur le guidon de sa mission, Hunt ne se déconcentre pas comme Bond à séduire charnellement une ou plusieurs des nombreuses femmes qui l’entourent.

Par ailleurs, on observe la dissolution progressive de l’ego du personnage d’Ethan Hunt, héros introverti à tendance paranoïde, au profit du groupe. Luther (Ving Rhames), pirate informatique, présent depuis le début de la saga MI, a évolué, plus humain, il connaît désormais Ethan mieux que personne, Benji (Simon Pegg), présent depuis MI3, au départ simple informaticien, va désormais risquer sa vie sur le terrain. Luther, Benji, Ethan, le noyau dur.

L’arrivée dans la saga, dans le rôle ambigu de Grace (prénom pas choisi par hasard), personnage surnuméraire (le réal cherchait un rôle pour elle depuis dix ans), est, au final, bienvenu, grâce à sa fraîcheur susceptible de dérider le nouveau Ethan Hunt, grave, costume gris 3 pièces, le cheveu court, la mine sévère ; voleuse professionnelle, imprévisible, rencontrée par hasard ou pas à Rome (cascade en voiture dans les rues de Rome, où Ethan est enchaîné fortuitement avec Grace avec des menottes (un incident à portée symbolique) ; TC adoube ici sa nouvelle partenaire avec qui il fait (quasiment) «jeu égal» à  l’écran. Grace apporte au film une note de légèreté, sur le ton de la comédie, son air perpétuellement étonné ou apeuré par ce qu’elle vient de déclencher, en volant la clé du mystère… Drôle de poursuite à bord d’une Fiat 500 jaune canari (que TC conduit d’une main)…

Cependant, cette translation d’Ilsa, warrior, sans peur, alter ego de Hunt (Ilsa, reléguée ici au second plan) vers Grace, nouvelle arrivée dans la saga, personnage à la fois indépendant mais dépendant de Hunt qui la coache dans les scènes d’action, donne le ton général d’un Tom Cruise professeur et coordonnateur d’action. Dans une interview, TC  dira ensuite «dans ce film, je suis à la fois l’élève et le professeur».

A noter la double cascade : En sautant de la falaise, TC arrivera directement sur le toit d’un train, duplicata de l’Orient-Express), Ethan Hunt combattant, à mains nues, Gabriel (Essai Morales), fantôme d’un passé occulté, sur le toit du train lancé à toute vitesse.

Hayley Atwell and Tom Cruise in Mission: Impossible Dead Reckoning Part One / from Paramount Pictures and Skydance.

Si ses cascades sont ébouriffantes, Tom Cruise est néanmoins moins présent qu’à l’accoutumée, Ethan semblant s’effacer peu à peu, au profit de sa mission (impossible) et de la cohésion de son commando de choc.

Ethan Hunt apparaît ainsi comme le leader du groupe, personnage à l’initiative de l’action, protecteur, empathique, responsable, jusqu’à se sacrifier pour protéger ses condisciples (On retrouvait ce thème de la transmission dans Top Gun Maverick). Ou pire, à sacrifier ceux qu’il aime pour sauver le monde.

MIDR1 / photo Paramount

 

 

Et aussi

3. Tom Cruise, le nouveau Gladiateur? (Le jeu avec la mort dans l’arène des cascades de ses films)

«We have to built the train if we want to destruct it»
(Christopher Mc Quarrie)

Le producteur Cruise et le réal MCQ ont donc fait construire spécialement un train destiné à être détruit… Mais un objet sur mesure générateur de cascades toujours plus survoltées.

Ce qui m’a frappé dans le lecture du DP (rapide, il est vrai, pour ne pas être influencée), c’est cette unique anecdote, en boucle, que veut bien confier Cruise en interview, reprise à l’envi dans les médias, qui aurait déclenché le reste de sa vie : Enfant, il rêvait d’atteindre le ciel en montant sur le sommet des arbres et en essayant maladroitement d’en décoller avec tout un barda artisanal. Aujourd’hui, il a toutes les licences pour piloter des avions et en a acquis un certain nombre qu’il pilote lui-même et dont la carlingue porte sa signature. Enfant, il avait aussi essayé une cascade à vélo avec les moyens du bord. Aujourd’hui, la moto Honda du film, destinée au Basejump depuis une rampe, à pic le long des falaises (cascade ultime du film), a été construite sur mesure pour Tom Cruise.

En contrepoint, Cruise, qui ne quitte plus McQuarrie depuis qu’il l’a mis aux commandes de la réalisation des deux derniers MI + MIDR1 (après l’avoir appelé souvent à la rescousse comme co-scénariste, notamment sur le Top Gun2), lui aurait demandé, avant le tournage de MIDR1, la paire cherchant des idées (encore plus spectaculaires que les précédentes), si il avait aussi un rêve d’enfant et le réalisateur aurait répondu : Détruire un train (casser ses jouets, donc). Car les deux hommes, devenus inséparables, partagent le même souhait, aussitôt un film terminé : Faire encore mieux, soit, encore pire en termes de cascades, dans le prochain film. Qui des deux influence l’autre? Une émulation bilatérale de deux personnes qui se «sont trouvées»? On peut se poser la question…

Quoi qu’il en soit, on a le sentiment que la promo des films appelle désormais les spectateurs à venir voir les défis Cruisiens lancés à la mort par l’entremise de cascades de plus en plus extrêmes. Cela fait bien six mois que la production a mis en ligne la cascade en moto, déjà devenue culte, puis, la préparation de la cascade en moto, en insistant sur les risques (véritables) pris par Tom Cruise, ignorant la peur, suscitant l’angoisse de toute l’équipe du film. Focus aussi sur l’entraînement drastique et interminable auquel s’est soumis, en amont, l’ultime star Hollywodienne. 

La saga des MI serait devenue avec le temps une arène pour un Gladiateur du troisième millénaire, imperméable à la peur… Ou, mieux, affrontant la peur, ce qui est la définition du courage. Lors d’une interview, Tom Cruise n’a pas nié sa peur légitime lors de ces cascades insensées tout en ajoutant «ça ne me dérange pas d’avoir peur». Le professeur, qui l’a entraîné (à Morzine dans les Pyrénées) au Speedflying (beaucoup plus dangereux que le Deltaplane que TC n’avait même jamais pratiqué), a commenté ensuite  «Il gère parfaitement sa peur, mentalement, il est vraiment fort». L’homme sans peur, le corps martyr consentant pour sauver le monde, film après film, les enchères grimpent.

Pour conclure, si c’est sans doute le meilleur film de la saga, du moins le plus ambitieux, si c’est sûrement le carton annoncé de l’été, ce n’est pas mon préféré… La quête de la perfection tue l’émotion… (C’est son écueil). Pour ma part, je préfère les imperfections généreuses, souvent émouvantes, d’une œuvre au film parfait parvenu (en conséquence de son obsessionnalité à tout exécuter dans l’excellence) à une quasi-neutralité émotionnelle.

 

Lire aussi les critiques…

Collateral :

Collateral : la solitude du tueur à gages

Top Gun Maverick

TOP GUN MAVERICK : Le Grand retour

 

 

Diffusion

Paramount : En salles le 12 juillet 2022

Notre note

4 out of 5 stars (4 / 5)

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Posted by:

Camille Marty-Musso
Créateur et responsable éditorial du site www.cinemaniac.fr, en ligne depuis janvier 2006.

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