« The Killer inside me » : éliminer les témoins à charge

Michael Witerbottom, sortie 11 aout 2010

Pitch

Une petite ville du Texas années dans les années 50, l'adjoint du shérif est un homme charmant aimé de tous. Sa rencontre fortuite avec une prostituée va réveiller des souvenirs d'enfance qui le transforment en meurtrier.

Le réalisateur ayant pris de le parti de l’absence d’angle psychologique, le personnage de Lou Ford qui tue les femmes un peu malgré lui va rester neutre, ni antipathique ni sympathique, ce qui est le comble. Néanmoins, on vous jette en pature la piste de la reproduction des schémas de souffrance, le père pervers, la mère de Lou, morte dans son enfance, battue autrefois par son père, expliquant à son fils qu’elle aime les coups. Ces flash-backs qui devraient être obsédants sont mous comme tout le film, un polar mou s’étirant sur un non sujet très littéraire d’un homme qui raconte le tueur en lui en voix off avec ses crimes qui prennent plus de place dans sa tête que dans le film. Un film adapté d’un roman de Jim Thompson (« Le Démon dans la peau ») par un réalisateur qui y a vu certainement autre chose qu’un thriller, visiblement pas attiré par ce genre et les amateurs seront déçus. Les quelques scènes de crimes sont isolées, il semble que plutôt que le crime en soi, on veuille nous montrer l’engrenage de la violence, la manière dont Lou Ford est submergé par ses pulsions violentes dans des conditions réactivantes de son enfance : face à une femme aimée : la prostituée, la fiancée.
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photo Mars distribution


Dépêché par son chef pour aller régler le problème de voisinage d’une prostituée, Joyce, Lou Ford en tombe amoureux mais pas n’importe comment. Joyce le frappe dès leur première rencontre, il répond en donnant des coups, le ton est donné… Plus tard, après quelques temps d’une liaison passionnée, Lou va rouer de coups Joyce qu’il laisse morte sur le carreau. Un peu comme si elle l’y avait poussé? (comme sa mère le lui demandait?) Joyce dit une phrase intéressante à Lou, qu’elle ne le lâchera pas, qu’elle le fera devenir un type moins bien qu’il n’est… Joyce a libéré le monstre en Lou, il devient accro à cette relation qui l’a désinhibé, c’est pour cela qu’il va la supprimer. Mais le vrai Lou qu’a fait resurgir Joyce sous sa carapace civilisée ne meurt pas avec elle…
 


photo Mars distribution


Pour brouiller les pistes, Lou tue un homme qui avait rendez-vous avec Joyce pour faire croire à une dispute qui a mal tourné. Un procédé éculé qu’il va essayer de reprendre avec Amy, sa fiancée. Ici, c’est plus complexe, contrairement à ce qu’on pourrait penser, la sage Amy ne dédaigne pas les violences sexuelles. Mais surtout, Amy veut se marier avec Lou qui accepte pour détourner son attention de sa liaison avec Joyce. Car Lou et Amy se connaissent depuis l’enfance, pour lui, elle n’a pas de mystère, Amy n’intéresse pas assez Lou pour comprendre qu’elle a une tendance masochiste s’accordant avec sa brutalité à lui. Lou considère plutôt Amy comme un miroir gênant qui lit en lui comme dans un livre ouvert, le renvoyant à sa détestation de soi, à ce qu’il ne mérite pas d’être aimé pour ce qu’il est vraiment.
 


photo Mars distribution

Le film mise beaucoup sur son acteur principal Casey Affleck, qui est de tous les plans, un acteur surdoué à qui on l’a sans doute trop dit, la VO pour une fois n’est pas à son avantage : il s’est concocté une voix digne de Brando dans « Le Parrain » assez horripilante. Dommage car sa physionomie est sobre en campant un assassin qui a la tête d’un type bien sauf quand il est en prise directe avant son passé, le regard alors inquiétant, capable de tout. Jessica Alba a préféré le rôle de Joyce, la prostituée, à celui d’Amy, la fiancée, interprété par Kate Hudson mais c’est la seconde qui réalise un vraie performance, son rôle est très délicat.
Ce qui a intéressé le réalisateur, ce n’est pas l’histoire d’un serial killer, c’est l’extrapolation d’un cas extrême à la part de sado-masochisme dans les relations de couple, dans les relations humaines en général. Enlisé dans l’intime du cerveau d’un tueur, le film n’est pas non plus dénué de défauts de mise en scène comme cette musique omniprésente ou ces flash-backs récurrents souvent inutiles alourdissant le récit. Ni thriller ni drame mais un peu les deux à la fois genre « la tragédie d’un tueur », on patine, on reste sur sa faim.

 

Notre note

3 out of 5 stars (3 / 5)

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Posted by:

Camille Marty-Musso
Créateur et responsable éditorial du site www.cinemaniac.fr, en ligne depuis janvier 2006.

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