Oh, Canada : la vérité

Paul Schrader, sortie 18 décembre 2024

Pitch

Condamné par la maladie, un célèbre documentariste veut rétablir la vérité sur sa vie…

Notes

Un documentariste célèbre se confie face caméra au terme de sa vie, confessant l’imposture que fut son existence. Pour cela, il accorde une ultime interview à l’un des ses anciens élèves pour dire enfin la vérité sur ce que fut réellement sa vie, exigeant pour cela la présence de son épouse. Très vite, en lieu et place des 25 questions préparées par celui qu’il estime son successeur, Leonard Fife se souvient à voix haute des tranches de son passé. Il n’a pas été cet objecteur de conscience réfugié au Canada. Il n’a pas toujours été cet époux modèle, dans les années 60, il avait femme et enfants, une vie trop bourgeoise qu’il a fuit. Parti pour acheter une maison qu’il voulait habiter loin de ses beaux-parents, mais comprenant qu’il ne pourrait jamais quitter Richmond, sous la pression de sa belle-famille, de sa femme, il n’est jamais revenu. Ce n’était pas prémédité, il a suivi son instinct qui l’a amené jusqu’au Canada. Et peut-être encore en amont, il se souvient avoir aussi épousé  une jeune femme qui voulait se marier mais il ne sait plus. 

C’est un film sur la recherche de la vérité nue par un homme âgé, Leonard Fife (Richard Gere), condamné par la maladie, qui n’a plus rien à perdre sauf sa réputation posthume à  laquelle il semble renoncer avec cette confession à laquelle il associe son épouse, Emma (Uma Thurman), en tant que témoin  malgré elle. Car, chez Schrader, au bout du chemin, si escarpé soit-il, la quête de rédemption est toujours présente. Cependant, en souhaitant être filmé, Leonard Fife, documentariste engagé, réputé pour dénoncer des scandales, ne fait-il pas, in fine, de sa vie le sujet d’un documentaire qui sera controversé à la sortie?

C’est un film puzzle déconstruit et reconstruit comme le sont les mécanismes de la mémoire, ce qu’on a été et ce dont on se souvient. Que reste-t-il d’une vie quand tout se conjugue au passé, imparfait?

«Qui peut dire où la mémoire commence, 

Qui peut dire où le temps présent finit…»

(Aragon, Les Yeux d’Elsa)

Une bonne partie du récit est en flash-back. Il y a quatre époques filmées de manière différentes dans leurs formats et tonalités. Le voyage de Leonard jeune en Virginie jusqu’à la frontière canadienne est filmé en écran large dans une couleur désaturée, l’interview, en plan plus rapproché, est en couleur (bien que, souvent, tout soit éteint, Fife sur la sellette, à sa demande), certains souvenirs anciens sont en noir et blanc, une scène clé (image sublime), d’une couleur ambrée comme le whisky posé sur une table. Jacob Elordi joue Fife jeune, parfois rejoint par Fife âgé, Richard Gere… Si la mécanique du film semble complexe (en la disséquant), et, en cela, elle respecte la brillante construction narrative du livre tout en la simplifiant, le film demeure fluide et, en cela, c’est un vraiment grand film.

Richard Gere, que Schrader avait rendu célèbre avec American gigolo, il y a 45 ans, livre une interprétation sobre et intériorisée qui s’inscrit parfaitement dans ce film voulu sans pathos (un tour de force, compte tenu du sujet).

 

 

 

Et aussi

Paul Schrader avait déjà adapté un roman de Russel Banks, Affliction (1997). L’écrivain était devenu son ami. Russel Banks, lui-même très malade, lui avait envoyé son livre, écrit avant de tomber malade…

OH, CANADA

OH, CANADA
(Jacob Elordi)
ARP Sélection

Longtemps, Paul Schrader a été connu comme scénariste, notamment pour Martin Scorsese avec Taxi driver (1976). Il réalise ses premiers films, Blue collar et Hardcore en 1978. Il réalisera ensuite une bonne dizaine de films dont Light sleeper (1992), Sur le chemin de la rédemption (2017), The card counter (2021), Master gardener  (2022).

Jacob Elordi, comme les acteurs de sa génération, est connu à la télévision (la série Euphoria et le film Saltburn, les 2 dispo sur PrimeVideo) et au cinéma (il joue Elvis Presley dans Priscilla de Sofia Coppola) ; on le verra bientôt dans Frankenstein, nouvelle adaptation de Guillermo Del Toro.

Sex-symbol adulé des années 80, Richard Gere oeuvre depuis 20 ans à des actions humanitaires. Quittant les USA, il s’apprête à finir ses jours à Madrid avec sa dernière épouse d’origine espagnole (d’après son interview au Monde) .

 

Diffusion

En compétition au Festival de Cannes 2024

Sortie en salles 18/13/2024

ARP Sélection

Notre note

4.5 out of 5 stars (4,5 / 5)

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Posted by:

Camille Marty-Musso
Créateur et responsable éditorial du site www.cinemaniac.fr, en ligne depuis janvier 2006.

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