« Nos Meilleures années » (« La Meglio gioventu ») : deux frères

Marco Tullio Giordana, 2003

Pitch

part 1.
Dans les années 60, deux frères, Matteo et Nicola, nourrissent les mêmes rêves de voyage, de liberté. Mais leur projet de périple au Cap Nord à quatre amis, voyage de fin d'études, est stoppé net par la rencontre de Georgia, une jeune fille schizophrène, qui va influer de manière radicale sur le cours de leur existence... Matteo s'engage dans l'armée, Nicola part seul en Norvège. Au retour, lors des innondations de Florence de 1966, il rencontre Giula, une pianiste.

part 2.
Nicola Carati est psychiatre, Matteo policier, Giulia est partie, activiste dans la lutte révolutionnaire. Giorgia retrouvée est soignée dans la clinique de Nicola qui élève seul Sara, la fille qu'il a eue avec Giulia. Carlo, l'ami des deux frères, qui a épousé Francesca, leur petite soeur, est menacé par les Brigades rouges. A Palerme, Matteo recontre Mirella, une photographe.

A Palerme, Matteo recontre Mirella, une photographe.Ce n’est certes pas la seule chose à noter dans ce film merveilleux mais j’avais été bluffée par l’acteur Luigi Lo Cascio lors du festival Miracolo du cinéma italien à Paris dont on ne voit malheureusement pas arriver la troisième édition. Il avait obtenu le prix d’interprétation masculine pour le film « Il Dolce e l’amore » pas encore sorti en France à ma connaissance où il m’avait fait penser à un mix entre Al Pacino et Roman Polanski, excusez du peu… Néanmoins, j’ai mis un moment à le reconnaître dans Nicola de « Nos Meilleures années » tant ce comédien extraordinaire peut investir un rôle et quel rôle… Ah, ce n’est certes pas en France qu’on aurait dans un film deux comédiens aussi hot que Luigi Lo Cascio et Alessio Boni, ici dans le rôle de deux frères Nicola et Matteo des années 60 à nos jours…

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Deux frères à la veille de leur examen de fin d’études : le studieux Matteo féru de poésie et Nicola, l’étudiant en médecine pas prise de tête, ne sachant pas quelle sera sa spécialité. Contrairement aux attentes, Matteo claque la porte sur un coup de nerfs, recalé à l’examen de littérature, et Nicola obtient son diplôme de médecine brillamment. Mais une rencontre fortuite de Matteo avec Giorgia, une patiente de la clinique psychiatrique dans laquelle il fait un petit boulot alimentaire, a peut-être déclenché ce comportement colérique de Matteo face à l’examinateur de l’examen à la fac qui lui  a demandé de parler de poésie religieuse. Choqué par les marques d’électrochoc sur les tempes de Gorgia, Matteo s’est mis en tête de la faire sortir de la clinique et de l’emmener avec eux en voyage. Mettant Nicola devant le fait accompli, les deux frères vont la ramener dans sa famille qui n’en veut pas et la perdre. Un petit voyage avec la jeune fille dans l’Italie profonde, tous deux plus ou moins amoureux d’elle, qui va les marquer à vie. Nicola deviendra psychiatre, Matteo recherchera l’ordre par tous les moyens : l’armée, la police.
 


Matteo est le personnage central du film, celui qui va infléchir le destin d’une famille, un vilain petit canard trop beau, trop sensible, trop près du ciel. Matteo, prononcé par Giorgia en bégayant, ça donne « Matto (fou), Matteo! » Car depuis sa naissance, le comportement de Matteo, hypersensible, qui se révélera inadaptable en société, est un mystère pour ses parents. Certainement proche de Giorgia en qui il s’est reconnu quand il l’a rencontrée par hasard, Matteo va signer la fin de l’insouciance de son frère Nicola après leur voyage à trois avec Giorgia : Nicola deviendra psychiatre très éclairé, utopiste, spécialisé aussi dans la défense des patients maltraités au tribunal et Matteo abandonnera la poésie pour l’ordre et des systèmes qui lui posent des limites, l’armée, la police où il se comporte de manière atypique, excessivement amical avec son seul ami qui finira paralysé mais moins malheureux que lui, trop violent devant les injustices. Un jour, à Palerme, Matteo rencontre Mirella, une photographe amateur, à qui il prétend s’appeler Nicola, il la reverra à Rome, terrifié par une histoire d’amour (il ne rencontre depuis son adolescence que des prostituées), mais quand Mirella le démasque, apprend qu’il est Matteo, policier, il ne le supportera pas…
La première partie est celle des meilleures années, 60, 70, car, dans la seconde partie, beaucoup vont mourir, d’autres naître, assurer la relève. Nicola, que l’insouciance  a déserté depuis longtemps, aura passé son existence à sauver celle des autres, à porter ses proches à bout de bras, à créer une structure libre pour ses patients qui pourraient être les frères de Matteo, il la finira en s’autorisant à prendre la place de ce frère trop aimé qui se détestait, et, une fois encore, il assurera l’interim.


Comme seuls savent le faire avec brio les films italiens, on plaque une saga familiale sur fond des événements historiques qui ont jalonné le pays pendant 40 ans : le plein emploi, les innondations de Florence, mai 68, les Brigades rouges, la lutte contre la mafia, etc… La grande force du film est de traiter l’histoire individuelle de la famille Carati de manière intimiste tout en la mettant en miroir avec l’histoire de l’Italie. La seconde partie est traitée beaucoup plus rapidement, on saute de 80 à 90 aux années 2000, cela n’a plus d’importance que le temps passe à toute vitesse, les meilleures années sont finies et ne reviendront pas, une nouvelle génération les empêche de mourir en assurant la transmission. Que de larmes et d’émotion pudique dans ce film italien nouvelle génération où la tragicomédie n’est plus de mise au profit d’un univers mélancolique éclairé de quelques rires et d’une faible lueur d’avenir. 

 

Notre note

5 out of 5 stars (5 / 5)

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Posted by:

Camille Marty-Musso
Créateur et responsable éditorial du site www.cinemaniac.fr, en ligne depuis janvier 2006.

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