« Innocence » : l’enfance volée, violée

focus livres/culture Fin août 2017

Pitch

L'enfance violée d'Eva Ionesco par une mère pseudo-artiste l'obligeant à poser pour des photos pornographiques.

Notes

« INNOCENCE » EVA IONESCO

Magnifique portrait d’une adulte rescapée de l’enfer d’une enfance traumatique qui se souvient de son passé avec le regard de l’enfant qu’elle était alors, une enfance volée par une mère névrosée et perverse qui la photographiait à son insu, plus tard contre son gré, depuis l’âge de quatre ans afin de vendre ces clichés pornographiques à des collectionneurs tarés. Bien que dans les années 70, la pédophilie ne soit pas tabou ou presque puisque ces photos feront la couverture du magazine « PHOTO » et que l’écrivain et réalisateur Robbe-Grillet lui demandera de tourner, enfant et nue, dans ses films sans que cela à l’époque ne choque grand monde…

Ici, Eva Ionesco est à la recherche de son père à qui sa mère la soustrait et dont l’image est salie par cette femme monstrueuse, car Irina Ionesco, elle-même fruit d’un inceste, avait les hommes en horreur. La force de ce livre sont tous ces détails de la vie quotidienne d’alors qui immergent le lecteur dans la vie insensée de cette petite fille trimballée de Londres à Ibiza, en passant par New York, seul moment de paix, où elle est accueillie par la vraie mère de sa mère qui se prétend sa sœur. La présence de cette grand-mère, seule consolatrice, avec qui Eva est reléguée dans une petite chambre de bonne, dont elle décrit admirablement l’exiguïté, tandis que la mère monstrueuse se prélasse dans un vrai appartement dans l’immeuble contiguë et où ont lieu les séances photos, est touchante, le lecteur sent bien que la grand-mère âgée disparue, seuls bras où elle peut se blottir, Eva va plonger…

Contrairement à « Eva » de Simon Liberati, son mari dans la vie, le récit d’Eva Ionesco stoppe à la mort de cette grand-mère, là où démarre le livre précédent. Le film réalisé par Eva Ionesco, « My little princess » avait été obligé de tricher sur l’âge (Eva y est nettement plus âgée, l’âge de « Lolita ») où démarrent les photos pornographiques prises par sa mère, Irina Ionesco, car on ne pouvait pas montrer aujourd’hui la vérité au cinéma sans risquer la censure.

Malgré le passé de sa mère, Irina Ionesco, qu’on devine très lourd, il est impossible de la trouver pathétique d’autant qu’Eva Ionesco la décrit comme elle la voit, enfant, une femme sale et exhibitionniste, laide et repoussante, amorale et délirante, vendant les clichés de sa fille souvent pour de l’argent,  la détestation de son bourreau lui conférant une lucidité effrayante.
Un livre aussi beau qu’il est triste. Très bien écrit avec des qualités visuelles rares d’évocation, proches du cinéma. Un livre bouleversant et je pèse mes mots.

Et aussi

http://www.cinemaniac.fr/my-little-princess-sous-l-objectif-maternel/

Diffusion

EDITIONS GRASSET 2017

aout 2017

Notre note

5 out of 5 stars (5 / 5)

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Posted by:

Camille Marty-Musso
Créateur et responsable éditorial du site www.cinemaniac.fr, en ligne depuis janvier 2006.

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